[REPORTAGE] Les musulmans de Barcelone au centre de toutes les attentions

Après plusieurs jours de silence souvent critiqué, plus de 140 entités musulmanes de Catalogne ont convoqué une manifestation ce lundi 19h Place Catalunya pour protester contre le terrorisme. 

Discrets depuis les attaques terroristes de Barcelone et Cambrils jeudi, les musulmans catalans ont commencé timidement à manifester samedi vers la Fontaine de Canaletes et se réuniront en masse ce lundi soir. Tariq, 45 ans, arrivé à Barcelone il y a plus de 20 ans était sur la Rambla ce week-end : « ces gens sont des fous, ils ne sont pas comme nous, les musulmans ne sont pas des terroristes! ». A ses côtés, sa fille de 14 ans, qui parle un catalan parfait, confie avoir peur que « tout le monde les déteste désormais ».

A quelques pas de là, dans le Raval, les rues sont plus désertes que d’habitude. Dans ce quartier de près de 50.000 personnes, la moitié des habitants sont étrangers, la plupart de confession musulmane. C’est aussi le quartier qui abrite le plus de mosquées et a été le théâtre de plusieurs arrestations en lien avec les attentas de Bruxelles. Le Raval, foyer barcelonais de radicalisation islamiste? “Non pas du tout, répond vivement Hamid Nassir, président de l’association musulmane Yamaat Ahmadia, il y a une radicalisation de l’Islam au niveau mondial, mais cela reste une minorité et on ne peut pas dire que le Raval soit un Molenbeek barcelonais ».

Pourtant, le danger est réel selon Rachid El Younoussi, secrétaire de l’association Darna. “Il y a dans le Raval une trop forte concentration de l’immigration venant de pays musulmans, explique-t-il, ils vivent dans un rythme métro-boulot-mosquée et la mosquée est leur unique influence sociale ». Le responsable associatif aimerait que les musulmans s’impliquent davantage dans les partis politiques locaux ou les mouvements civiques. Pour cela, il estime que les autorités devraient faire un effort supplémentaire pour intégrer la communauté à la vie sociale catalane. « Il est urgent d’agir, sinon cet attentat ne sera rien à côté de ce qu’il peut nous arriver dans 5 ans, poursuit-il,  contrairement à la France ou à la Belgique, ici nous en sommes encore à la première génération d’immigrés, qui aime son pays d’accueil, mais qu’en sera-t-il quand la deuxième génération prendra la suite? »

La crainte de l’islamophobie

Le constat est partagé par Mohamed El Ghaidanou, président de l’Union des Communautés Islamiques de Catalogne “La plupart des imams ne parlent ni espagnol ni catalan, ils ne peuvent donc pas enseigner un Islam compatible avec la société catalane, analyse-t-il, il nous faut des professeurs de religion islamique formés dans les écoles publiques, il ne faut plus laisser l’éducation religieuse à ces imams”.

Mais avant de penser aux solutions, la plupart des musulmans de Barcelone craignent une vague d’islamophobie. « Il faut dire aux gens que nous ne sommes pas des terroristes, insiste Tariq, ces fous ont pris notre religion en otage, ils ne nous représentent pas, notre religion nous interdit de tuer des innocents ». Dans les rues du Raval, les Catalans semblent en être parfaitement conscients. « Bien sûr que tous les musulmans ne sont pas comme ça, ce sont d’ailleurs les premières victimes, il ne faut pas encourager les haines » estime Montse, la petite quarantaine et résidente du quartier depuis 20 ans.

Vendredi, la maire de Barcelone Ada Colau assurait à ses administrés : “nous ne permettrons pas que la haine et le racisme s’installent parmi nous”.

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