S’expatrier, c’est aussi se confronter à ses propres idées reçues. Et entre la siesta et la fiesta, les clichés sur les Espagnols ont la vie dure.
Photos : Clémentine Laurent
Des stéréotypes parfois amusants, souvent réducteurs, et presque toujours erronés dès qu’on prend la peine de creuser un peu. Car l’Espagne, ce n’est pas seulement des bars à tapas, des commerces fermés pendant l’heure de la sieste et des nuits sans fin : c’est aussi un pays où l’on travaille dur, où l’on débat fort et où l’on vit à un rythme qui, pour un Français, peut sembler à la fois déroutant et enviable.
1. Vous avez dit fainéants ? Vraiment ?
Les Français adorent se moquer de la fameuse siesta espagnole et de la longueur des vacances espagnoles. Pourtant, la réalité est un peu différente : beaucoup d’Espagnols travaillent plus de 40 heures par semaine contre 35 en France, parfois avec des journées qui commencent plus tôt le matin pour éviter la chaleur de l’après-midi. Autre surprise : l’âge légal de la retraite est plus élevé qu’en France et vient même d’être repoussé à 67 ans.
Tandis que le chômage peut être touché après 1 an contre 8 mois en France et ses conditions sont bien moins généreuses qu’en Hexagone. Ajoutez à cela une économie florissante : avec une hausse de 2,9 % du PIB en 2025, et vous comprendrez que cette idée reçue n’a pas lieu d’être.
Pour déconstruire ce cliché : On va travailler dans une entreprise espagnole et on donne son avis après.
2. Toujours en retard les Espagnols ? Peut-être plutôt en décalage
Les Français adorent se moquer des horaires espagnols. Mais la vérité, c’est que nous sommes tellement habitués à manger avec les poules et à sortir beaucoup plus tôt que parfois nous n’hésitons pas à faire fi des traditions locales pour proposer des rendez-vous à des heures improbables pour nos cousins ibères. Magnanimes, ils répondent un vague « vale » que nous prenons pour une confirmation alors qu’ils préféraient se faire guillotiner que de dîner à 19h30 ou d’entrer les premiers dans un club…
Pour déconstruire ce cliché : la clef c’est de s’adapter. Ici, dîner à 22h ou faire la fête après minuit n’est pas du retard, c’est juste le timing parfait.
3. Gueulards ? Oui, mais mélodieusement
On dit souvent que les Espagnols parlent fort. Une passion pour les décibels manifeste qui se traduit aussi par un amour du chant et de la musique. Si dans les soirées françaises, on se hasarde – passée une certaine heure – à reprendre en chœur les lacs du Connemara, en Espagne (bien) chanter ensemble est une composante essentielle des longues soirées. Flamenco, rumba, rythmes latins… Chacun y va de son accord de guitare ou de ses castagnettes ou pousse la chansonnette étonnamment juste et mélodieuse.
Pour déconstruire ce cliché : On investit dans un casque anti-bruit dans le métro et on prend des cours de palmas pour participer.
4. Toujours heureux ? Pas si simple
Contrairement à l’image d’une population insouciante et joyeuse, les Espagnols font face à des défis en matière de santé mentale. L’Espagne figure parmi les pays les plus stressés au monde, avec 59% de sa population déclarant souffrir de ce mal. Cette réalité contraste avec l’image de bonheur souvent associée au pays.
Pour déconstruire ce cliché : on prend des nouvelles de ses amis locaux pour savoir comment ils vont vraiment, et on ne se fie pas toujours aux grands sourires derrière lesquels se cachent parfois des réalités plus compliquées.
5. Fêtards ? Sans modération
La fête est une composante essentielle de la culture espagnole. Ici, on ne s’étonne pas de voir des parents boire un verre au bar à côté de l’aire de jeux où s’ébroue leur progéniture, de la présence d’enfants au cœur de la nuit, et des fêtes de quartier qui s’étirent jusqu’au petit matin. Ici, on sait se retrouver, célébrer ensemble de manière intergénérationnelle et peut-être moins cloisonnée que de l’autre côté des Pyrénées.
Pour déconstruire ce cliché : la prochaine fois qu’on s’étonne qu’un dîner de entre voisins se transforme en bacchanale qui vous empêche de fermer l’œil, on se rappelle qu’ici, faire la fête, c’est surtout faire société.

