Depuis le début de la crise sanitaire, les demandes d’allocations chômage et RSA se multiplient mais leurs versements s’éternisent. À ce jour, des milliers d’Espagnols n’ont toujours pas perçu leur dû, les laissant dans une situation de plus en plus précaire. Que fait l’Espagne ?
« À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles » estime l’économiste catalan Josep Miró Roig, « il faudrait octroyer d’office toutes les aides aux demandeurs et traiter les dossiers plus tard, car les laisser sans revenu pendant des mois est une erreur » poursuit-il. Depuis le printemps dernier, les demandes d’allocation chômage, de ERTE (chômage partiel) et de RSA ont effectivement explosé de façon exponentielle.
Le Ministère du Travail comptabilisait, par exemple, 3,4 millions de sollicitations de ERTE entre les mois d’avril et mai. Avec autant de doléances, le traitement au cas par cas des dossiers a entraîné de grands retards au niveau des versements. « Ce n’est qu’une question de temps » juge Josep Miró Roig, directeur du cabinet de conseil JMR Consulting. Néanmoins, nombreux sont ceux qui se retrouvent sans revenu depuis plusieurs mois.
Chômage et RSA : prendre son mal en patience
Les demandeurs sont contraints de prendre leur mal en patience, à l’instar de Patrick (le prénom a été changé pour préserver son anonymat), francophone originaire d’Afrique et résident à Barcelone depuis 6 ans. Ce dernier a sollicité la SEPE (Servicio Público de Empleo Estatal) pour percevoir le Ingreso Mínimo Vital (le RSA espagnol) en juin dernier. Il travaillait à l’hôtel à Vincci Bit Barcelona mais la crise sanitaire a entraîné son licenciement. Suite au confinement, de nombreux hôtels ont fermé. Le secteur de l’hôtellerie est par ailleurs l’un des plus meurtris par la crise sanitaire. À ce jour, le quadragénaire n’a perçu aucune aide de l’État, qui « se réserve le droit de répondre jusqu’au 31 décembre » ajoute-t-il.

« Les administrations manquent de personnels »
Bien avant la crise sanitaire, les procédures liées à une demande d’argent ou à un droit de sécurité sociale nécessitaient déjà un suivi plutôt chronophage et complexe. “D’après moi, toutes les procédures qui vont coûter de l’argent à l’État impliquent un traitement long, souligne l’économiste Oriol Amat, mais à ce jour, je pense que la majorité des demandeurs ont perçu leurs allocations. »

Oriol Amat, économiste
Selon le directeur du cabinet de conseil JMR Consulting, Josep Miró Roig, “les administrations manquent clairement de personnels. Elles se sont retrouvées du jour au lendemain avec des millions de gens au chômage. Peut-être que l’État pourrait temporairement embaucher des gens pour faire traiter les demandes sans pour autant créer des postes fixes » suggère-t-il.
Entraide et solidarité pour lutter contre la précarité
« Depuis le mois de juin dernier, j’attends une réponse de l’État. Que fait-il ? s’interroge Patrick, je compte seulement sur la solidarité de mes amis. » Par ailleurs, Oriol Amat souligne que l’organisation Caritas a, depuis le début de la crise sanitaire, observé une forte augmentation des demandes et de plus en plus de mairies multiplient la mise en place des banques alimentaires pour les plus démunis.
Quant à l’avenir des Barcelonais, « c’est un terrain incertain, se soucie Patrick, difficile de se projeter et ma recherche d’emploi est compliquée entre le couvre-feu, les hôtels et bars fermés. Je n’ai pas trop de solution. Je n’ai plus qu’à ne pas perdre espoir » . En attendant une action du gouvernement, les résident en Espagne comptent sur la solidarité de leur entourage ou des associations de leur ville.