Après un printemps exceptionnellement pluvieux et la fin de l’alerte sécheresse, les autorités catalanes tirent la sonnette d’alarme : cet été pourrait être l’un des plus dangereux sur le front des incendies
Photos : AC/Equinox
Plus de 10.0000 hectares brûlés et deux morts. Les incendies qui se sont succédés depuis le début du mois de juillet sont les plus meurtriers de la région depuis plus de 12 ans . À chaque fois, les pompiers parlent de feux « de grand intensité ». Celui de Segarra, qualifié d’incendie « de sixième génération » a provoqué une colonne de fumée haute de 14 kilomètres.
Cette nouvelle appelation désigne « des feux d’une intensité telle qu’ils modifient la dynamique des couches supérieures de l’atmosphère, créant des vents extrêmement difficiles à modéliser. Cela empêche toute prévision fiable de l’évolution du feu » a récemment expliqué Inazio Martínez de Arano, directeur de l’Office régional méditerranéen de l’Institut forestier européen interrogé par le think tank SMC.
Les fortes pluies du printemps n’ont donc pas stoppé le risque incendie, bien au contraire. Selon les experts de la gestion forestière, l’alerte est claire : l’été 2025 pourrait être l’un des plus dangereux. « Les pluies ne doivent pas nous faire croire à un été tranquille », martèle Núria Parlon, ministre catalane de l’Intérieur. L’eau abondante a en effet favorisé une repousse explosive de la végétation, notamment du sous-bois, densifiant encore plus des massifs déjà fragilisés par des années de stress hydrique. Et dans les forêts, les arbres morts, qui représentent désormais près de 28 % du couvert végétal, n’ont pas disparu pour autant. Résultat : une masse végétale sèche et inflammable, posée sur un lit d’herbes hautes prêtes à s’embraser au premier coup de chaud.
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Ce scénario, les autorités catalanes s’y sont préparées. Le plan annuel de prévention des incendies forestier prévoit un renfort significatif des moyens humains et technologiques. Les pompiers catalans seront 133 de plus que l’an dernier, atteignant un effectif de 2 930 professionnels, accompagnés de plus de 1 500 volontaires.
Mais c’est du côté de la technologie que la principale nouveauté se joue : l’intégration de 25 drones intelligents, capables de repérer des départs de feu à toute heure, y compris en conditions climatiques défavorables. « Cela nous permet d’anticiper des situations qui, il y a quelques années, auraient nécessité un survol en hélicoptère », explique un responsable du service d’incendies de Catalogne.
Les zones les plus surveillées ne sont pas forcément celles des autres années. La Garrotxa, le Ripollès ou encore le Pla de l’Estany, régions jusqu’ici peu sujettes aux grands feux, sont aujourd’hui classées à haut risque. « Ces territoires, traditionnellement humides, ont connu une croissance végétale rapide qui, combinée à des accès difficiles pour les secours, les rend particulièrement vulnérables », avertit Jordi Martí, chef des pompiers de la province de Gérone.
Barcelone sous surveillance
À Collserola, poumon vert de Barcelone, les exercices de simulation s’intensifient également. En mai, un grand rallye de coordination a réuni pompiers, forestiers et unités de protection civile autour d’un scénario fictif de feu de forêt. L’objectif : réduire les temps de réaction, tester la compatibilité des systèmes de communication et identifier les points faibles de l’intervention.
Sur le terrain, les gardes-forestiers multiplient aussi les actions préventives : débroussaillage, brûlage dirigé, ouverture de pistes coupe-feu. Mais ces mesures sont coûteuses, lentes à mettre en œuvre, et parfois contestées par les associations écologistes. « L’entretien des forêts n’est pas qu’une question de biodiversité, c’est un enjeu de sécurité publique », rappelle un technicien du ministère de l’Action climatique.
Enfin, le gouvernement catalan tente aussi de sensibiliser la population via des campagnes de communication, comme le programme « Stop al foc », qui rappelle les bons gestes à adopter en zone forestière.
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