Chaque été, Barcelone se transforme en scène à ciel ouvert. Des festes majors de Gràcia à celles de Sants, les quartiers rivalisent de créativité pour offrir concerts, décorations spectaculaires et dancefloors improvisés. Un programme gratuit, populaire et 100 % barcelonais.
Photos : Louise Garcia
À Barcelone, il y a deux types de fêtards. D’un côté, les passionnés de boîtes, pénétrant au Shôko et à l’Apollo comme si c’était chez eux; et de l’autre, les fous de fêtes de quartier. De plus en plus, ces derniers supplantent les premiers, présentant des arguments imparables : dépenses moindres, ambiance bon enfant et ancrage local.
Julien, 30 ans, vit à Barcelone depuis 5 ans et n’a pas peur de le dire : il adore les festes majors. Pour lui, c’est bien simple, elles ont tout bon (et tout mieux que les clubs) : « C’est gratuit, les bières sont pas chères, tu es dehors à l’air libre, c’est ouvert à tous donc aucun risque de se faire recaler, c’est tenu par des associations donc tu fais vivre le quartier, il y a une ambiance familiale et en plus on se croirait dans un festival, en l’espace de 3 ou 4 rues tu peux passer d’une scène techno à une scène reggaeton ! Il y en a pour tous les goûts. » Le chimiste est catégorique : il n’y a pas mieux que les festes majors.
Et la ville de Barcelone le sait bien. Ces fêtes sont un gros levier d’attractivité permettant, comme le dit le Français, de faire vivre les quartiers et surtout de vendre une certaine idée de Barcelone, moins portée sur les paillettes et davantage sur les coutumes traditionnelles comme les correfocs, les castellers et les géants. La cité catalane organise plus de 70 de ces fêtes par an, dont une trentaine entre juin et septembre.
La tradition et une certaine impression « d’appartenir à la ville » est aussi ce qui attire Clément (le prénom a été changé), qui habite Barcelone depuis 3 ans et demi. Lui n’est de toute façon pas fan de boîtes à la base. Avec les festes majors, il trouve tout ce qu’il aime dans la fête, c’est à dire une grande variété de musique, des bières pas chères et une bonne ambiance.
Laura, 35 ans et mariée à un Catalan, est on ne peut plus d’accord : « Pendant les fêtes, les gens sont là pour rigoler, pas seulement pour draguer, il n’y a pas de prise de tête, tout le monde est là juste pour s’amuser ! » Elle qui a deux enfants le sait bien, ce qui plait est aussi l’intergénerationnalité, impossible à reproduire en boîte de nuit. Ici, enfants et grand-parents dansent ensemble jusqu’au bout de la nuit, renchérit Julien : « J’adore voir les petits de 7/8 ans sauter partout à minuit comme si c’était la soirée de leur vie, jusqu’aux papis de 80 ans se déhanchant avec leur bières à la main comme s’ils en avaient encore 20 ! »
Victimes de leur succès ?
Cette atmosphère bon enfant attire de plus en plus de monde, touristes compris. Aux fêtes de Gràcia ou Sants, on accueille des dizaines de milliers de personnes chaque année. Celle de Gràcia, la plus emblématique, enregistre plus de 500 000 visiteurs sur une semaine, tandis que la fête de la Mercè, en septembre, dépasse les 1,5 million.
Mais cette popularité a un revers. Julien confie que, selon lui, la fête de Gràcia a perdu en charme : « Ces deux dernières années, les fêtes de Gracia sont devenues une attraction touristique. Les touristes arrivent en masse, les rues sont saturées, ça devient vite ennuyant de devoir jouer des coudes pour avancer à 20 mètres et pouvoir voir 3 décorations en une heure… De par la fréquentation touristique les prix ont bien augmenté aussi ! Les locaux commencent à la déserter. »
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Sants, en revanche, conserve encore une ambiance plus populaire. « Les décorations concurrencent celles de Gràcia et les prix des consos restent inchangés », assure Julien. Mais pour combien de temps ? À Barcelone, même les fêtes les plus authentiques ne résistent pas longtemps à l’appel des foules.