Seize jours consécutifs de températures extrêmes, plus de 1.100 morts et des incendies incontrôlables : l’été 2025 restera comme un tournant climatique pour l’Espagne.
Photo : Clémentine Laurent
Le mois d’août 2025 restera gravé comme l’un des plus étouffants jamais connus dans la péninsule ibérique. Du 3 au 18 août, le pays a subi une vague de chaleur hors normes, qui s’est finalement hissée parmi les plus longues jamais enregistrées depuis 1975. Annoncé comme bref, il a fallu revoir sa durée à plusieurs reprises tant les températures extrêmes se prolongeaient jour après jour, jusqu’à atteindre seize journées caniculaires consécutives.
Cet épisode a mis à rude épreuve la population et les infrastructures, avec un bilan dramatique : 1.149 décès liés directement aux températures. La situation s’est aggravée par la combinaison des nuits torrides, où les thermomètres ne descendaient parfois pas sous les 27 °C à Madrid, Barcelone ou Séville, et des journées qui semblaient sans fin, notamment en Andalousie et en Estrémadure. Même le nord, généralement plus tempéré, a battu des records : Oviedo a enregistré 41,2 °C, plus de deux degrés au-dessus de son précédent maximum.
Trois jours du mois, les 11, 16 et 17 août, comptent désormais parmi les dix plus chauds depuis 1941. Le 11 août a même été classé comme le troisième jour le plus brûlant jamais relevé en Espagne. Dans cette atmosphère suffocante, les plages et les montagnes n’ont pas offert le répit espéré. Les brises marines ont rapidement perdu de leur effet protecteur et jusque dans les Pyrénées, des villages situés à plus de 1.000 mètres d’altitude ont frôlé les 43 °C.
Deux fois plus de canicules qu’au siècle dernier
Cette intensité n’est pas un phénomène isolé mais l’illustration d’une tendance lourde. Depuis le début du siècle, le nombre de vagues de chaleur et leur durée se sont envolés. Entre 1975 et 1999, l’Espagne avait connu 212 jours caniculaires. De 2000 à 2024, ce chiffre a quasiment doublé 474 jours de chaleur extrême.
Et 2025 vient déjà ajouter 22 supplémentaires à ce compteur. Les climatologues soulignent que cette évolution n’a rien d’accidentel : le changement climatique agit comme un accélérateur qui transforme ces événements extrêmes en une nouvelle normalité.
Les incendies ont constitué l’autre visage de cette canicule. Après un printemps exceptionnellement pluvieux, la végétation s’est densifiée. Sous l’effet de la chaleur prolongée et du déficit de précipitations estivales, les sols et les forêts se sont asséchés à une vitesse inédite. Cette fragilité a favorisé l’embrasement de nombreux massifs, les flammes étant attisées par les vents et la topographie. Pour les experts, la corrélation est désormais claire : chaque grande vague de chaleur augmente la probabilité d’incendies dévastateurs.
Au-delà des records météorologiques, la vague d’août 2025 met en lumière un enjeu sanitaire majeur. Les médecins rappellent que les coups de chaleur ne touchent pas uniquement les personnes âgées ou fragiles : “personne n’est à l’abri”, préviennent-ils. La prévention – hydratation, adaptation des rythmes de vie, espaces climatisés – devient une question de survie dans une Espagne où l’été semble désormais sans limite.