Des touristes par milliers… mais des restaurants vides sur la Rambla de Barcelone

L’une des avenues les plus emblématiques de Barcelone traverse une période de turbulence. Jadis animée et prospère, la Rambla voit ses terrasses se vider, et ses restaurateurs contraints de s’adapter à de nouvelles réalités économiques et sociales.

Et pourtant, Barcelone n’a jamais attiré autant de visiteurs. La ville bat des records de fréquentation touristique. Mais sur la plus célèbre artère du centre, les commerçants peinent à suivre. « Cette année, on travaille moins que l’année dernière à cause des travaux. Il y a du bruit et les gens ne veulent pas rester en terrasse », déplore Ali Khan, restaurateur installé sur la Rambla.

Les longs travaux de rénovation, censés redonner un souffle à l’avenue, perturbent la circulation des visiteurs. Notamment celle des croisiéristes, selon le commerçant. Ces touristes éphémères, souvent en groupe et encadrés par un guide, évitent désormais l’avenue en chantier pour explorer des quartiers plus calmes.

Sécurité, réputation, nouvelles habitudes

Mais le vacarme des marteaux-piqueurs n’explique pas tout. Victor, manager du Gran Café Ramblas depuis vingt ans, observe une transformation plus profonde : « Beaucoup de choses ont changé : la sécurité, les travaux, la réputation. Certains disent que les prix sont trop élevés ou qu’on n’est pas honnêtes. Mais ici, on affiche les prix finaux, contrairement à d’autres terrasses. » Il résume la situation : « Barcelone a ses problèmes. Des gens évitent la Rambla à cause des voleurs. Et les touristes consomment moins. »

Les habitudes évoluent. Les visiteurs privilégient désormais les supermarchés aux restaurants. « On les voit passer avec des sacs de courses. Avant, ils prenaient au moins un café ou un menu. Maintenant, ils dépensent beaucoup moins », observe le responsable du restaurant Bruma. Un constat partagé bien au-delà de la Rambla.

« La saison s’est bien passée, très bien. Les taux d’occupation ont été excellents, mais dans certaines zones, les dépenses ont chuté, notamment en restauration. Peut-être qu’en raison de la hausse des prix des hôtels, les gens ont été plus réticents à sortir déjeuner ou dîner », analyse Santiago Vallejo, vice-président de l’association du tourisme.

Prix, menus low cost et loyers élevés

Face à cette baisse de fréquentation, les restaurateurs adaptent leurs menus. Les formules à 14,95 €, jadis réservées à la basse saison, se sont généralisées sur toute l’avenue. « Avant, on n’en proposait pas. Cette année, tout le monde s’y est mis à cause de la hausse des prix des aliments et des boissons », explique Ali Khan. « Un menu à 15 euros, c’est un minimum. Le prix des fruits de mer, du poisson, de l’huile… tout a augmenté. Regarde, il est 14h et je n’ai eu qu’une seule table. Le soir, c’est un peu mieux, mais pas de quoi faire fortune », ajoute-t-il.

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L’authenticité des établissements, elle aussi, s’érode. Beaucoup de restaurants appartiennent à un petit nombre de propriétaires, avec des cartes identiques. « Il reste très peu d’adresses typiques », regrette un habitué. Quant à la qualité, le patron de Bruma se défend : « C’est pour ça qu’il y a Google, les avis, les étoiles. Si ce n’était pas bon, les gens ne seraient pas venus avant. Et les prix sont affichés avant de s’asseoir, donc il n’y a pas de surprise. »

Malgré les difficultés, certains gardent espoir. La Rambla reste une vitrine incontournable de Barcelone, même si elle n’est plus la mine d’or d’autrefois. « Avant, on gagnait beaucoup d’argent ici. Mais les choses ont changé : les guerres, l’inflation… Les gens ne dépensent plus comme avant », reconnaît Victor.

Travaux, insécurité, inflation, nouvelles habitudes touristiques… La Rambla cherche un second souffle. Pour redevenir ce qu’elle a été, elle devra sans doute se réinventer. Des restaurants plus attractifs et mieux adaptés aux attentes actuelles pourraient en être la première étape.

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