Pourquoi Pedro Sanchez s’engage-t-il autant pour la Palestine ?

pedro sanchez photo moncloa

Le Premier ministre espagnol a annoncé ce lundi matin première heure neuf mesures pour freiner « le génocide à Gaza ». Une fois de plus, il prend la tête des pays européens pour la défense de la Palestine. 

Il a été le premier chef de gouvernement à s’impliquer autant dans le conflit entre Israël et la Palestine. Pedro Sánchez fut pionnier pour qualifier la guerre au Proche-Orient de génocide. Le Premier ministre s’est également placé en avant-poste pour stopper la livraison d’armes à destination d’Israël.

Pour sa rentrée politique, Sánchez ne s’attaque pas au chômage, ni à la crise du logement en Espagne, mais annonce « franchir une nouvelle étape et de mettre en œuvre immédiatement neuf mesures supplémentaires pour mettre un terme au génocide à Gaza, pour poursuivre ses exécutants et pour soutenir la population palestinienne ». Dans une déclaration institutionnelle donnée à 9h ce matin depuis le siège du gouvernement à Madrid, Pedro Sánchez a listé neuf mesures pour lutter contre « le génocide à Gaza ».

« Nous savons que toutes ces mesures ne suffiront pas à stopper l’invasion, ni les crimes de guerre, mais nous espérons qu’elles contribueront à exercer une pression sur le Premier ministre (Benyamin) Netanyahou et son gouvernement pour alléger une partie des souffrances que subit la population palestinienne », a poursuivi le dirigeant socialiste. Parmi les mesures, qui seront mises en œuvre « immédiatement », figure l’approbation d’une loi visant à « consolider juridiquement l’embargo sur les armes à Israël, que nous appliquons déjà de facto depuis octobre 2023 », a déclaré Pedro Sánchez.

Le Premier ministre a aussi annoncé l’interdiction du passage par les ports espagnols de navires transportant des carburants destinés aux forces armées israéliennes, ainsi que l’accès à l’espace aérien espagnol à tout aéronef transportant du matériel de défense destiné à Israël. Une autre mesure prévoit l’interdiction d’entrée sur le territoire espagnol pour toutes les personnes impliquées directement dans des actes de génocide ou des crimes de guerre.

L’Espagne augmentera son aide aux Palestiniens et à l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), a ajouté Pedro Sánchez. « Ce n’est pas se défendre » ni « attaquer, c’est exterminer un peuple sans défense, c’est enfreindre toutes les lois du droit humanitaire », a fustigé le dirigeant espagnol à propos des opérations menées par Israël à Gaza.

Raisons politiques et historiques

Si le conflit entre Israël et le Hamas est en tête de la todo-list de Pedro Sanchez, c’est pour un certain nombre de raisons aux sources souvent distinctes. Les mauvaises langues diront que c’est pour mettre sous le tapis, les moisissures de la corruption qui laisse toujours le Premier ministre Pedro Sánchez au bord du précipice politique. Un argument d’ailleurs repris ce matin par le gouvernement israélien qui a répondu à Madrid :  » La tentative du gouvernement corrompu de Sánchez de détourner l’attention de graves affaires de corruption par une attaque continue, anti-israélienne et antisémite, est transparente « .

La position espagnole sur le conflit israëlo-palestinien puise aussi ses racines dans l’Histoire. Lors de la création de la création de l’État d’Israël en 1949, l’Espagne était dirigée par l’extrême-droite, ancienne alliée du nazisme, en la personne du Général Franco. De fait, la dictature n’a jamais reconnu l’État hébreu. Et la démocratie espagnole a plus que pris son temps. Il faudra attendre 11 ans après la chute du régime, en 1986, pour que le gouvernement socialiste reconnaisse officiellement l’existence d’Israël. Entre temps, le leader palestinien Yasser Arafat était reçu sous les ors des palais madrilène.

Mais la raison principale de l’action du chef de l’exécutif est tout simplement arithmétique : les socialistes dirigent le pays avec l’ultragauche, et donner des gages à celle-ci, dans une cause primordiale à ses yeux, est relativement simple pour le chef de l’exécutif. En la matiére, la locomotive est souvent pilotée par l’extrême-gauche. Ce week-end, Yolanda Diaz, vice-présidente du gouvernement et cheffe du parti Sumar, a expliqué sur le réseau social BlueSky qu’elle négociait âprement avec les socialistes pour déclarer Netanyahou persona non grata en Espagne et pour la fermeture de l’ambassade espagnole à Tel Aviv.

Ces initiatives sont d’autant plus faciles à prendre pour Pedro Sánchez que la population est, en Europe, la plus favorable à la cause palestinienne. Près de 80% des Espagnols sont en faveur de la reconnaissance de la Palestine et le pays s’est illustré, depuis le début du conflit, par ses nombreuses manifestations en faveur de Gaza. Même le Tour cycliste d’Espagne, la semaine dernière, a été marqué par les interruptions causées par des activistes pro-palestiniens.

Mais cette position n’est pas sans conséquences : Israël n’a plus d’ambassadeur à Madrid depuis la reconnaissance de l’État de Palestine par le gouvernement de Pedro Sánchez en mai 2024.

Une annonce, au timing compliqué, avec l’annonce d’un attentat à Jérusalem-Est quelques minutes après le discours de Pedro Sánchez. Une acte sanguinaire félicité par les terroristes du Hamas qui a couté la vie à 12 Israéliens, dont un citoyen espagnol, Yaakov Pinto. Le Premier ministre espagnol aura attendu près de 4 heures avant de condamner la barbarie sur le réseau social X. Le locataire de la Moncloa a réaffirmé sa condamnation de la violence qui n’est pas une solution. 

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