samedi 6 décembre 2025

Courses à moitié prix : pourquoi ces Français traversent la frontière pour acheter en Espagne

berenger cyne

Trajets planifiés, coffres remplis et tickets de caisse allégés : de plus en plus de Français traversent la frontière pour faire leurs courses en Espagne. Viande, produits ménagers, essence… Leurs tarifs sont si attrayants en Espagne que les consommateurs français préfèrent délaisser les enseignes de l’Hexagone. Témoignages. 

Photo : Bérenger Cyne

Sur les parkings des grands supermarchés de la Jonquera, de Gérone ou de Figueras, les plaques d’immatriculation françaises ne passent plus inaperçues. Depuis plusieurs années, de nombreux habitants du Sud de la France traversent la frontière pour faire leurs courses en Espagne. Objectif : alléger un budget alimentaire et ménager en constante tension. Attirés par des écarts de prix parfois spectaculaires sur la viande, les produits ménagers, l’essence ou les cosmétiques, ces consommateurs français organisent de véritables expéditions commerciales en quête de bonnes affaires. C’est le cas de Lisa, 29 ans, chef d’entreprise vivant à Vendargues, près de Montpellier, et Pierre, 55 ans, résidant à Perpignan, qui partagent pour Equinox leurs habitudes de consommation devenues presque un rituel.

Pour elle, ce va-et-vient entre la France et l’Espagne dure depuis une décennie : « Je fais mes grosses courses en Espagne depuis 10 ans. Je m’y rends en voiture, je profite de mes vacances pour prendre l’avion de Barcelone et faire les courses sur le retour. » Le déplacement n’est donc pas qu’un simple détour : c’est un moment planifié, optimisé, intégré à ses voyages qu’elle tente de rentabiliser.

Même logique pour Pierre, installé lui aussi dans le Sud de la France et habitué de ces virées shopping : « J’y vais depuis plusieurs années, je m’y rends en voiture. Les courses sont généralement planifiées, et je me tâche à remplir de gros caddies ». Tous deux parlent ainsi de “grosses courses”, composées avant tout de viande, de produits ménagers, de produits cosmétiques, et dans le cas de Pierre, aussi de légumes et parfois de vêtements.

Important écart de prix

Le moteur principal de ces virées dans les centres commerciaux en Espagne est simple : le prix. Lisa détaille : « Les produits dans les enseignes espagnoles sont moins chers qu’en France, on voit en général des écarts entre 5 et 15 € de différence par article » Sur un chariot complet, l’addition diverge fortement d’un côté à l’autre de la frontière, selon ses calculs : « Sur un plein de courses à 300 € en Espagne, je pense qu’en France ce même plein m’aurait coûté facilement 550 €. Sans parler de l’essence avec une différence de 50 centimes le litre. »

supermarche barcelone

Pierre, lui, a presque chiffré précisément ses dépenses : « Sur un plein de courses, en déduisant le transport, je fais environ 80 € d’économie sur la viande, 40 € sur les légumes et 20/30 € sur les produits ménagers. L’économie sur l’essence est comprise dans le coût du transport. » Il interroge également l’absurdité ressentie par certains consommateurs : « La raison principale est le prix ; de plus, pourquoi acheter des produits espagnols comme les légumes en France à un prix plus cher ? Autant aller à la source quand on peut se le permettre. »

Lire aussi : Comment les commerces de quartier résistent face à l’inflation et aux achats en ligne

Les économies ne se font pas sans contrepartie : traverser la frontière a un coût. Lisa l’a intégré dans son budget : « Quand je descends uniquement pour les courses, je dépense environ 40 € de péage et 60 € d’essence. On reste quand même gagnant. » Pour elle, le déplacement reste rentable malgré sa centaine d’euros dépensés en transport, dès lors qu’il s’agit de gros volumes de courses. Pierre corrobore ce constat, en expliquant qu’il inclut déjà l’essence dans ses calculs d’économies. Résultat : ces Français ne vont pas en Espagne pour acheter deux paquets de pâtes et un litre de lait, mais pour remplir un coffre entier de voiture. Le panier moyen, lui, se compte en centaines d’euros.

Viande, ménage, cosmétiques : les stars du caddie transfrontalier

Les produits les plus recherchés forment un trio désormais classique dans ce type de pratiques : viande, produits ménagers, produits cosmétiques. Pierre détaille, avec quelques nuances : « J’achète des produits ménagers, la viande, les légumes, l’essence et certains vêtements. Mais, la plus grande part des dépenses est réservée à la viande et aux produits ménagers. »

À cela s’ajoutent parfois des vêtements et du “shopping” plus large dans les enseignes espagnoles, jugées plus attractives : « Le shopping représente quand même une grande partie », insiste Lisa, qui estime une différence de 5 à 15 € par article sur certains textiles ou produits de marque.

Ces pratiques ne sont pas réservées à un profil type. Lisa, 29 ans, mariée sans enfant, chef d’entreprise, et Pierre, 55 ans, en couple et en activité professionnelle, n’ont ni le même âge ni le même statut familial, pourtant, leurs motivations convergent. Tous deux insistent sur le même facteur : le pouvoir d’achat. À la question de savoir ce qui pourrait les faire revenir massivement vers les supermarchés français, Pierre répond sans détour : « Ce qui m’inciterait à acheter en France ? Comme tout le monde : le prix. »

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