Espagne : la justice se penche sur la gestion du Covid-19

Quinze mois après le début de la crise sanitaire, la justice espagnole commence à étudier la légalité de certaines pratiques et décisions.

Le tribunal constitutionnel espagnol pourrait estimer la semaine prochaine que le confinement décrété mi-mars 2020 par le chef du gouvernement Pedro Sanchez était illégal. Selon la Haute Cour, le confinement a provoqué une suspension des droits fondamentaux, en allant au-delà de limiter leur exercice. Seul un état d’exception aurait permis de les suspendre. Or, le gouvernement espagnol n’a décrété que l’état d’alerte, premier niveau de l’état d’urgence.

Le recours a été présenté par le parti d’extrême-droite Vox qui estime que l’article 7 du décret du premier état d’alerte, interdisant la libre circulation des personnes sauf exception, était inconstitutionnel. Si le tribunal lui donne raison dans une sentence attendue le 22 juin, les centaines de milliers d‘amendes infligées entre mars et juin 2020 seront annulées. La Cour constitutionnelle irait toutefois à l’encontre de deux précédentes décisions du Tribunal suprême, saisi par des citoyens sur la même question, qui avait estimé que la santé publique permettait la limitation de la mobilité.

Les juristes eux-mêmes ne sont pas d’accord sur l’interprétaion des textes dans un contexte engageant la santé publique. Juan Maria Bilbao, professeur de droit constitutionnel à l’Univesité de Valladolid, estime qu’une « pandémie aussi grave ne correspond pas bien à la norme légale de l’état d’alerte, et il faudrait revoir la régulation de 1981, mais elle correspond encore moins à l’état d’exception ».

Des banques qui auraient profité de la crise

Mais le gouvernement espagnol n’est pas le seul à devoir aujourd’hui rendre des comptes. Certaines banques sont actuellement visées par une enquête de la Commission de la Concurrence dans le cadre de la gestion des prêts ICO, concédés par les entités financières pendant la crise et couverts par l’aval de l’Etat. Banco Sabadell, Banco Santander et Caixabank sont soupçonnées de « pratiques restrictives de la concurrence » dans le cadre de l’octroi de ces prêts.

L’enquète vise à déterminer si ces banques ont profité de la situation d’asphyxie du secteur économique pour forcer leurs clients demandant des prêts ICO à souscrire à d’autres services financiers ou en leur proposant de restructuer leurs dettes grâce à ce dispositif, ce qui avait été formellement interdit par le gouvernement. Si l’enquête est toujours en cours, la Commission estime avoir assez de preuves et de plaintes de consommateurs pour mener des recherches approfondies et déterminer ainsi si l’intérêt public a été menacé.

Les assurances priées d’indemniser les fermetures

Les assurances, elles, font actuellement face à des milliers de plaintes d’entreprises, en particulier du secteur de la restauration et de l’hôtellerie. Toutes réclament une indemnisation pour leurs fermetures de 2020. Une compensation qui leur avait été jusque là refusée, les assurances estimant que les contrats ne couvraient pas ce type d’incident. Concrètement pourtant près de 20% des contrats incluent la clause de fermeture, mais les entités estiment qu’elle ne s’applique pas en cas de fermeture imposée par une décision administrative ou une pandémie.

En février dernier pourtant, un juge a donné raison à une pizzeria qui a été indemnisée par son assurance. Les conditions générales de la police d’assurance stipulaient que les fermetures administratives n’étaient pas couvertes, mais cette clause n’étant pas spécifiquement citée dans le contrat signé par l’entrepreneur,  le juge a estimé qu’elle n’était pas valide. Depuis, les recours d’entreprises affluent, dont celui du chef français Romain Fornell qui réclame une indemnisation pour la fermeture forcée de ses restaurants à Barcelone. Les associations d’avocats estiment que les plaintes vont cncore se multiplier, et encouragent les entreprises à faire valoir leurs droits.

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