Déjà lancinant tout au long de l’année pour les habitants, le tourisme de masse à Barcelone va atteindre son paroxysme dans les deux mois à venir. Voici quelques chiffres, données et statistiques qui permettent de mesurer l’influence du phénomène.
Money, money. Évidement, si les Barcelonais, en tout cas les décideurs, créent une dynamique touristique, c’est pour des raisons pécuniaires. Le tourisme pèse pour 13,5 % du PIB local et représente 15,7 % des emplois dans les entreprises privées. Un chiffre qui peut être certes positif, mais avec un revers de la médaille cabossé. Déjà par le côté mono-culture du volume d’emplois généré par le tourisme qui se concentre dans les secteurs de l’hôtellerie, la restauration et les services. Un phénomène de prison dorée : la ville devient otage du modèle touristique et se demande si chaque décision ne va pas avoir des conséquences sur l’attrait des visiteurs.
La bataille du logement
En premier lieu, le logement est au centre de toutes les polémiques. Le maire Jaume Collboni a annoncé l’interdiction des logements touristiques à compter de 2028. Les quelque 10 000 appartements actuellement autorisés ne verront pas leur licence renouvelée à cette date. Cependant, la mesure ressemble à un pansement sur une jambe de bois. Le fait de donner un délai de plus de trois ans avant d’appliquer l’interdiction est perçu comme inefficace à court terme. Beaucoup doutent de la capacité réelle de la mairie à faire respecter la mesure face à des géants comme Airbnb ou à la multiplication des locations illégales. Selon les statistiques, l’impact des Airbnb est très limité et tourne autour de seulement 0,77 % du parc immobilier.
Les prix des loyers à Barcelone ont augmenté d’environ 88 % en moyenne, durant la dernière décennie, selon les données du portail d’annonces immobilières Fotocasa. Le tourisme perturbant le logement est pointé du doigt par près de la moitié des Barcelonais qui jugent le montant de leur loyer trop élevé par rapport à leurs revenus. Différents facteurs entrent en cause. Évidement, la multiplication des logements touristiques qui réduisent automatiquement le parc immobilier. Ensuite, les propriétaires qui ne disposent pas de licence touristique utilisent, de manière détournée, une loi permettant de créer un bail temporaire de 11 mois au lieu des cinq ans classiques. Des contrats qui sont souvent signés par des expats ou des digitals nomads, que les locaux amalgames volontiers avec des touristes.
Une densité plus forte à Barcelone qu’à New York
Enfin une donnée hallucinante : Barcelone enregistre une densité annuelle moyenne de 201 722 touristes par kilomètre carré. Avec plus de 20,3 millions de visiteurs par an pour à peine 101 km². Le chiffre barcelonais dépasse allégrement la densité moyenne de villes comme Cancún (147 887), Porto (143 902) ou encore New York (137 712). Trop de monde, plus de consommation énergétique et donc de pollution.
L’empreinte environnementale est significative, le tourisme générant environ 9,6 millions de tonnes de CO2 équivalent par an, dont 95,6 % proviennent des transports, notamment l’aviation, avec 97 kg de CO2 par jour et par visiteur. Les navires de croisière amplifient la pollution, avec 32,8 tonnes d’oxyde de soufre émises en 2017, et Barcelone est la ville portière la plus polluée d’Europe depuis 2019. En pleine saison touristique, les poubelles de la Rambla sont vidées 14 fois par jour selon la mairie de Barcelone.
La surpopulation se fait sentir aussi sur les plages centrales de Barcelone dépasse largement 100 % de leur capacité. Et sur le bord de mer, il n’y a pas que les baigneurs. Toutes les trois minutes, un vendeur vient proposer ses services ou produits dès que l’on entre dans la Barceloneta, selon une expérience qu’Equinox a mené sur ce territoire touristique. Pour une journée de plage classique, disons 4 heures, le vacancier sera donc sollicité 80 fois.
La saison 2025 s’annonce comme du jamais-vu. L’Espagne, pour la première fois de son histoire, va dépasser la barre des 100 millions de visiteurs. C’est, selon les spécialistes, le seuil maximum, de ce que les infrastructures espagnoles peuvent gérer. Le reste est une entrée en terre inconnue.