Pour les expats français, Barcelone n’est pas toujours la solution. Certains, qui ont choisi d’éviter la métropole, nous racontent pourquoi entre loyers intenables, rythme effréné et tourisme de masse, ils ont préféré Valence, Málaga, Minorque ou Cambrils.
Même si Barcelone est souvent citée comme l’eldorado des expats français, il existe d’autres villes en Espagne où il fait (très) bon vivre pour les ressortissants tricolores. Ahmed, 27 ans, connaît bien la capitale catalane.
Arrivé à Barcelone pour travailler dans le développement commercial, il a vite ressenti une instabilité chronique : « Dans mon entreprise, mes collègues ne restaient jamais plus d’un an », observe-t-il, et trouver un studio relevait de l’exploit : « Avec l’inflation, c’était vraiment galère. »
Valence lui a offert un logement abordable et un rythme plus posé. Le même salaire lui permet désormais de vivre seul dans un quartier central, ce qui serait hors de portée à Barcelone. Les chiffres confirment : un studio en centre-ville coûte en moyenne 1 060 € à Valence contre 1 300 € à Barcelone, soit environ 18% de moins.
Pour Jean, 36 ans, photographe originaire des Landes, Barcelone est une belle escale, pas une destination de vie. Après cinq ans au Danemark, il s’installe cet hiver en Espagne avec son mari, d’abord dans la campagne murcienne puis à Málaga. » C’est une grande ville mais pas immense, proche de la plage et d’un aéroport international, avec plein de choses à faire autour et des opportunités d’emploi pour nous deux. » Barcelone ? « J’y retournerai en touriste, mais je ne m’y vois pas. »
Certains ne sont même jamais passés par Barcelone. Emmanuel, 45 ans, a quitté la France pour Valence à 25 ans, séduit par les Fallas et la vie nocturne. Et puis après la crise de 2008, il s’est installé à Cambrils, petite ville côtière de Catalogne. Aujourd’hui père de deux enfants et gérant d’un appart-hôtel avec spa, il savoure un rythme « slow, simple et à l’espagnole ». Barcelone reste à portée pour un concert ou une sortie, mais le quotidien se vit sans embouteillages ni pollution.
Marc, 45 ans, partage son temps entre Minorque et Premià de Mar, sur la côte catalane. Tombé amoureux de l’île en 2008, il y a dirigé le plus petit hôtel d’intérieur de Minorque avant de le revendre. Il profite désormais de sa maison avec licence touristique, savourant « les eaux minorquines et le calme, tout en pouvant passer quelques jours à Barcelone quand l’envie me prend ».
Barcelone, victime de son succès
Ceux qui s’en écartent dressent le même constat : la capitale catalane s’est transformée en machine à touristes. En 2024, elle a accueilli près de 15 millions de visiteurs, soit neuf fois sa population municipale. Résultat : loyers en hausse et transports saturés. « C’est une ville où ça bouge tout le temps, mais parfois trop », résume Ahmed. Le turnover professionnel et la concurrence accrue sur les postes pèsent aussi dans la balance : à salaire équivalent, le coût de la vie grignote vite le budget.
La mairie tente de freiner la dérive en gelant les nouvelles licences touristiques, ou en réduisant les logements touristiques d’ici 2028. Mais la pression immobilière reste forte, d’autant que le marché a été remodelé par les attentes d’Airbnb et des locations de courte durée.
Pour ces Français, s’installer ailleurs qu’à Barcelone ne signifie pas renoncer à l’Espagne vibrante, mais choisir un rythme compatible avec leurs envies. Valence, Málaga, Minorque ou Cambrils offrent un rapport plus équilibré entre habitants et visiteurs, un accès au logement moins douloureux, et une vie culturelle à taille humaine. Barcelone garde ses attraits pour un week-end ou un événement mais elle a perdu, pour eux, la promesse d’un quotidien vivable.