Note financière : l’Espagne progresse pendant que la France s’enfonce

Tremblement de terre économique : l’Espagne voit sa note financière officiellement relevée, tandis que la France subit un déclassement. Madrid devant Paris : ce vieux rêve pourrait-il devenir réalité ?

Il y a moins de deux semaines, François Bayrou, alors encore Premier ministre, lançait à un journaliste une diatribe anti-espagnole pour défendre la puissance économique française : « Passez la frontière, allez en Espagne, et vous verrez comment la situation est dramatique. » Ce vendredi 12 septembre, le glas a pourtant sonné : l’agence Fitch a abaissé la note souveraine de la France de « AA- » (qualité élevée) à « A+ » (qualité moyenne supérieure). La France est sanctionnée suite à l’échec des quatre gouvernements qui se sont succédé en un an à contenir le déficit public. Au même moment, l’agence américaine S&P hissait l’Espagne d’un cran, à « A+ ». Résultat : les deux pays se retrouvent à égalité, mais la dynamique est désormais du côté espagnol.

S&P prévoit pour l’Espagne une croissance du PIB de 2,6 % en 2025, soit plus de trois fois la moyenne attendue dans la zone euro, quand la France plafonnerait à 0,8 %. L’agence souligne qu’une décennie de désendettement du secteur privé a renforcé la solidité du pays : la balance extérieure s’est améliorée et la capacité à encaisser d’éventuelles crises économiques s’est accrue.

Cette vitalité est en grande partie attribuée à l’immigration, notamment latino-américaine, à la hausse de l’investissement et aux effets durables des réformes structurelles menées depuis dix ans.

La crise politique pourrait ralentir l’Espagne

Cependant, le rapport sonne aussi la sonnette d’alarme sur l’instable situation politique du pays. Dans le futur, la note pourrait de nouveau être abaissée si les dérapages budgétaires « dans un contexte de forte fragmentation politique » inversaient la tendance à la baisse du déficit et de la dette publique. « Le risque politique persiste, même s’il est probable que la coalition gouvernementale se maintienne », indique le rapport, qui précise que le Premier Ministre socialiste, Pedro Sanchez « dirige une fragile coalition gouvernementale minoritaire » et que « les récentes accusations de corruption visant des membres proches du gouvernement » ont accentué ce risque.

Pour 2026, S&P prévoit que la croissance économique ralentisse à 1,9 %, tandis que pour 2027 et 2028, elle anticipe des hausses de 1,8 %.

L’Espagne devant la France : le rêve de toujours

Lors du miracle économique des années 2000, l’Espagne a fait un bond spectaculaire, dopée par l’entrée dans la zone euro et des taux d’intérêt historiquement bas. L’économie connaissait une croissance fulgurante, proche de 4 % par an, tirée par une frénésie immobilière sans précédent. Des millions d’emplois furent créés, l’immigration afflua pour alimenter les chantiers et la consommation intérieure explosa, tandis que les finances publiques affichaient même des excédents. De nombreux analystes et commentateurs espéraient à voix haute que l’Espagne dépasse la France. Las, la bulle immobilière et la crise des subprimes ont alors mis l’Espagne à genoux. La France, avec ses amortisseurs sociaux, a mieux tenu le choc.

Mais cette fois-ci, l’Espagne est mieux armée avec un système économique plus solide. La dette espagnole est moindre que la française : 104 % du PIB, contre 113 % pour la France. Moins de dette, moins de risque de spiralisation. Du coup, pour la France, le coût du financement est potentiellement plus élevé et la prime de risque accrue pour les investisseurs. Pour résumer : l’Espagne a plus de marge de manœuvre et moins de boulets à traîner que la France.

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