La tension monte entre l’Espagne et Israël après l’annulation de l’arrivée du Tour d’Espagne

La scène est inédite dans l’histoire du cyclisme moderne. Dimanche soir, les manifestants pro-Palestine ont réussi à stopper la dernière étape de la Vuelta à Madrid, transformant le centre de la capitale espagnole en champ de bataille.

Depuis le départ, la journée avait des allures de jeu du chat et de la souris. À mesure que le peloton s’élançait en direction de Madrid, les organisateurs modifiaient discrètement le tracé pour tenter de contourner les rassemblements signalés. En vain.

À l’approche de la capitale, des milliers de manifestants, équipés de drapeaux palestiniens et de fumigènes aux couleurs de la Palestine, ont envahi les derniers kilomètres du parcours. Le passage est devenu totalement impossible. La police, massivement déployée, a tenté de repousser les manifestants à coups de charges et de flashballs. En vain également : face à l’ampleur du cortège, les organisateurs ont décidé d’interrompre la course à plus de 50 kilomètres de l’arrivée.

Les coureurs ont rejoint les voitures de leurs équipes. Dans les rues, les manifestants continuaient d’affluer pour célébrer l’annulation de l’étape, tandis que des affrontements avec les forces de l’ordre se poursuivaient sur plusieurs portions du parcours prévu. La cérémonie du podium a été annulée, aucun vainqueur d’étape n’a été désigné.

Trois semaines sous tension

Cet épilogue chaotique est venu couronner trois semaines marquées par une tension croissante. Le 27 août, lors de la 5e étape disputée à Figueres, des manifestants pro-Palestine avaient brièvement bloqué la route de l’équipe israélienne Israel-Premier Tech, sans incidence majeure sur la course.

vuelta manif

Mais dès le 3 septembre, à Bilbao, le mouvement s’est durci : la pression exercée par les protestataires a conduit à l’annulation de l’étape. Au total, sept étapes sur vingt et une ont été perturbées par des actions ciblant la présence de l’équipe israélienne dans la course. Ces incidents se sont multipliés : étape neutralisée à 8 kilomètres de l’arrivée en Galice, contre-la-montre raccourci à Valladolid, blocages sur la route de la Bola del Mundo… Jusqu’à cette dernière journée madrilène, où la tension a basculé dans la confrontation directe entre manifestants et policiers.

Crise diplomatique

Ces manifestations ont aussi pris une dimension politique, soutenues ouvertement par le gouvernement espagnol. Avant même le départ de cette ultime étape, le Premier ministre Pedro Sánchez avait exprimé son « admiration » pour les manifestants.

Dans la soirée, son ministre de la Transition numérique, Óscar López, a assumé publiquement se réjouir de l’interruption de la course. « Le peuple de Madrid s’est levé pour dire stop au génocide. Je regrette pour la Vuelta, mais c’est un signal adressé à la communauté internationale. Je suis fier que notre pays refuse de fermer les yeux sur ce qui se passe en Palestine. »

Des propos qui ont provoqué la colère immédiate de Tel-Aviv. Le ministre israélien des Affaires étrangères a dénoncé Pedro Sánchez comme « une honte pour l’Espagne ». Les relations entre les deux pays se sont nettement durcies depuis que Madrid s’est érigée en chef de file européen du soutien à la Palestine.

Lundi dernier encore, Sánchez a annoncé neuf nouvelles mesures diplomatiques contre Israël . Il avait été aussitôt qualifié d’« antisémite » et de « corrompu » par les autorités israéliennes, en référence aux enquêtes judiciaires visant plusieurs membres de son entourage.

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