vendredi 19 décembre 2025

Acheter en Espagne : les régions les plus exposées aux inondations

Le soleil, la mer, les oliviers… L’Espagne fait rêver ceux qui veulent s’offrir une résidence secondaire. Mais certaines zones du pays sont désormais considérées à haut risque d’inondation. Entre urbanisation sauvage et dérèglement climatique, mieux vaut savoir où ne pas acheter.

Depuis plusieurs années, des milliers d’étrangers investissent dans l’immobilier espagnol, séduits par les prix encore attractifs et un climat que l’on croit éternellement clément. Mais derrière les cartes postales de la Costa Blanca ou de la Costa del Sol se cache une réalité plus inquiétante : les épisodes d’inondations sont de plus en plus fréquents et destructeurs.

Deux facteurs se conjuguent : une urbanisation massive de zones côtières inadaptées — plaines, marais, lits de rivière — et la multiplication des épisodes méditerranéens extrêmes, connus sous le nom de goutte froide ou DANA (Depresión Aislada en Niveles Altos). Il s’agit de dépressions d’altitude isolées : lorsqu’un air froid se glisse au-dessus d’une mer très chaude, la différence de température crée une instabilité atmosphérique explosive. En quelques heures, ces méga-orages déversent des pluies diluviennes, capables de transformer les rues en torrents.

Résultat : routes inondées, maisons submergées, voitures emportées… et des dégâts matériels qui se comptent en millions d’euros.

La région de Valence, la plus touchée

C’est dans la Communauté valencienne que la nature s’est montrée la plus impitoyable. Il y a à peine un an, le 29 octobre 2024, une violente tempête s’est abattue sur la région. Son épicentre : Paiporta, petite ville de la périphérie sud de Valence. En quelques heures, des pluies torrentielles ont submergé routes, habitations et zones industrielles. Le drame a fait plus de 220 victimes et laissé une empreinte durable dans les mémoires.

Ce qui rend ces secteurs particulièrement vulnérables : un terrain extrêmement plat, des nappes phréatiques proches de la surface, un fleuve qui déborde facilement, et une urbanisation massive faite parfois sans prise en compte réelle des risques hydrauliques. Les villes réputées comme Torrevieja, Orihuela Costa ou Guardamar del Segura, très prisées des acheteurs étrangers, sont parmi les plus exposées. Acheter là sans vérifier le plan d’inondation, c’est véritablement jouer à la roulette russe.

Murcie : les pieds dans la lagune

Juste au sud de Valence, la région de Murcie subit les mêmes dérèglements. Autour du Mar Menor, lagune autrefois paisible, les pluies torrentielles transforment régulièrement les rues de Los Alcázares, San Javier ou San Pedro del Pinatar en torrents de boue. En 2019, plus de 200 litres/m² sont tombés en quelques heures, inondant des quartiers entiers.

Le problème vient d’une urbanisation rapide sur des sols argileux et plats, incapables d’absorber l’eau, et de la présence des lits de rivières à sec qui se remplissent brusquement pendant les orages. La lagune elle-même reçoit les ruissellements de la huerta murcienne (grande zone agricole verdoyante et irriguée autour de Murcie), saturée d’irrigation.

Malgré tout, le marché immobilier reste dynamique, attiré par les prix bas. Les autorités ont bien renforcé les infrastructures — la capacité de stockage des eaux de pluie a été multipliée par quatre depuis la DANA de 2019, mais la région demeure l’un des points noirs hydrologiques du pays.

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Carte des dangers et des risques d’inondation – MITECO

L’Andalousie, la beauté fragile de la Costa del Sol

Entre Málaga et Marbella, la Costa del Sol continue d’attirer les acheteurs étrangers avec son soleil garanti et ses villas de rêve. Mais derrière cette image de carte postale, le risque d’inondation est bien réel. La région est traversée par des arroyos (petits lits de rivières asséchées) qui se transforment en torrents dès qu’un orage éclate.

En mars 2022, à Estepona, plus de 160 litres/m² sont tombés en douze heures, provoquant des crues soudaines et l’activation du plan d’urgence municipal. Certaines zones, comme l’arroyo Guadalobón, sont classées à risque maximal d’inondation, mais cela n’a pas freiné la construction de nouveaux logements.

Plus à l’ouest, vers Cadix, le problème s’aggrave : les marais côtiers et les plaines proches du Guadalete subissent à la fois les crues et la montée du niveau de la mer, qui empêche les eaux de s’évacuer. Les municipalités tentent de réagir avec des projets de réservoirs pluviaux — les fameux tanques de tormentas —, mais ces travaux peinent à suivre le rythme de l’urbanisation. Sur la Costa del Sol, le paradis immobilier a donc son revers : un décor somptueux, mais fragile, où un simple orage peut tout bouleverser.

Catalogne et Baléares : cartes postales sous pression climatique

Au nord-est de l’Espagne, le détroit de l’Ebre, en Catalogne, apparaît comme l’un des territoires les plus exposés au changement climatique du pays. Les scientifiques avertissent : la baisse des apports sédimentaires du fleuve, la montée du niveau de la mer et la subsidence du territoire rendent cette zone « extrêmement vulnérable ». À long terme, ce mélange de facteurs pourrait rendre certaines zones littorales pratiquement inhabitables.

inondation

Dans les îles Baléares, le cas de Sant Llorenç des Cardassar à Majorque rappelle que même une destination touristique paisible n’est pas à l’abri. En octobre 2018, une crue éclair inexpliquée a déferlé sur le village après 220 litres/m²en quelques heures : des torrents ont littéralement emporté des maisons, provoquant la mort d’une dizaine de personnes. Et plus récemment, en septembre 2025, Ibiza a été submergée par une pluie extrême : près de 254 litres/m² relevés en 24 h, coupant routes et écoles, déclenchant l’intervention de l’armée et de nombreux secours.

Pour l’acheteur, le message est simple : en Espagne, même les régions les plus paisibles peuvent se transformer en piège aquatique. Qu’il vienne de la mer ou du ciel, le risque d’inondation est désormais une réalité partout. Acheter une maison au soleil reste un excellent investissement… à condition d’ouvrir les yeux. Avec le réchauffement climatique, les épisodes extrêmes se multiplient, frappant parfois des zones jusque-là considérées comme sûres. Ce qui semblait sans danger il y a vingt ans ne l’est plus aujourd’hui. Avant de signer, mieux vaut donc consulter les cartes de risques, interroger la mairie, et éviter les plaines alluviales ou les deltas trop plats.

Avant d’acheter : quelques vérifications simples

Pour éviter les mauvaises surprises, mieux vaut se renseigner avant d’acheter :

  • Consultez la carte officielle des zones inondables sur le site du MITECO.

  • Demandez à la mairie (ayuntamiento) si le terrain est en zone inondable.

  • Évitez les maisons construites sur des terrains plats, à proximité d’un fleuve ou d’un ravin.

  • Vérifiez que votre assurance couvre bien les catastrophes naturelles via le Consorcio de Compensación de Seguros, l’organisme public qui indemnise les sinistrés.

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