Oriol Amat : « Le prix de l’électricité en Espagne va baisser »

reprise economique en Espagne

Oriol Amat, professeur à l’Université Pompeu Fabra et vice-doyen du Collège des Économistes de Catalogne, livre son analyse pour Equinox concernant l’inflation et le futur économique de l’Espagne.

Peut-on s’attendre à une grande crise économique en Espagne à la rentrée ?

Ça dépend de ce que vous appelez une crise économique. Si vous entendez par là, une chute de l’économie, cela ne se produira pas. Par contre, on peut s’attendre à une décélération de la croissance en raison de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt. La croissance sera donc plus faible que prévue. En 2022, nous ne récupérons pas les niveaux de l’activité économique que nous avions avant la pandémie. Pour cela, il faudra attendre 2023, si ce n’est 2024.

On avait annoncé une crise économique majeure après le Covid et elle n’a pas eu lieu.

On avait aussi dit qu’avec la vaccination, l’économie reprendrait. C’est d’ailleurs ce que l’on a vu lorsque, progressivement, la majorité de la population a été vaccinée.

On avait aussi dit que le tourisme reprendrait difficilement après la pandémie, ce qui n’est pas le cas.

Le tourisme a été coulé pendant la pandémie et quand nous n’avions pas de vaccins. Lors de cette saison 2022, nous assistons à une récupération beaucoup plus rapide que prévue en nombre de vacanciers. On le voit dans les taux d’occupation des chambres d’hôtels ou des sièges d’avions. Il y a énormément de touristes en Espagne, mais les prix des séjours et des dépenses ont baissé par rapport à 2019. Donc la rentabilité n’est pas au rendez-vous pour le secteur touristique. Par ailleurs, progressivement, les compagnies aériennes augmentent leurs tarifs, mais simultanément les coûts de l’énergie et du pétrole explosent. Donc le secteur aérien se trouve en ce moment dans une situation très compliquée.

Comment vont évoluer les crises énergétiques : gaz, pétrole et électricité ?

On parle beaucoup de la guerre en Ukraine, mais je rappelle que les prix de électricité avaient déjà monté avec beaucoup de force avant l’invasion de l’Ukraine. Et il n’y a pas de raison que cela change à court terme. L’Europe avait prévu une grande transition verte pour son énergie avec le fameux « Green Deal ». Une transition qui a du plomb dans l’aile en raison du conflit avec la Russie et les mesures contre son gouvernement. Les technologies dont a besoin l’Europe pour obtenir son autonomie énergétique n’existent pas encore. Du coup on parle d’augmenter l’espérance de vie des centrales nucléaires, ce qui était un sujet tabou jusqu’ici. Cela pourrait provoquer une petite baisse du prix de électricité à court terme.

Comment va évoluer l’inflation en Espagne ?

Nous assistons à une hausse d’inflation jamais vue depuis 30 ans. L’évolution de ce phénomène dépend des politiques gouvernementales qui seront, ou non, mises en place. Au Japon par exemple, l’inflation est très basse. La raison réside dans le fait qu’il y a eu dans ce pays un grand pacte entre les forces sociales, politiques, les entreprises et le gouvernement. Ce qui a permis de limiter la hausse des prix dans tous les secteurs. Si ce type de pacte n’a pas lieu dans les prochaines semaines en Espagne, l’inflation va continuer de grimper, ce qui est très mauvais pour l’économie, parce que les banques centrales augmentent leur taux d’intérêt. Cela limite la croissance et se traduit immédiatement dans l’économie.

Les risques de crise sont les mêmes pour la Catalogne que dans le reste de l’Espagne ? 

Oui, ils sont similaires, même s’il y a une importante différence entre les deux économies. La catalane dépend moins du secteur publique et elle est plus forte dans les secteurs des exportations, du tourisme et des investissements internationaux. La Catalogne a un poids plus important dans l’industrie, qui est un secteur très résiliant.

 

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