L’expatophobie est en vogue à Barcelone. Vu comme un bourge ne parlant qu’anglais, et s’alimentant uniquement sur les Ramblas, le nouvel arrivant est souvent pointé du doigt par les locaux. Une nouvelle vidéo qui buzze sur les réseaux alimente ce phénomène.
« J’adore Barcelone parce que j’ai les poches pleines ». Vêtu d’un manteau de fourrure et se dandinant sur la Rambla, l’arrivant barcelonais fait peine à voir avec les lunettes de l’expatophobie, que chaussent certains habitants de la ville.
Ici, ce message de rejet de l’autre prend des airs presque enfantins, sur une mélodie électro-pop où Svetlana, célèbre chanteuse d’origine moldave connue pour son sarcasme, enchaine les clichés à la limite de la xénophobie quand même la nourriture argentine est stigmatisée. Car dans cette vision étriquée, l’expat ne mange évidemment que des tapas, de la paella… et des empanadas argentines qui n’en demandaient pas tant. Le tout dégusté avec un fort accent tantôt français tantôt anglais.
Le refrain « I Love BCN », martelé comme une accroche touristique, vire rapidement à la caricature. Avec humour et second degré, l’artiste déconstruit les images de carte postale : le tout sur un beat dansant, presque trop joyeux pour être honnête. « I Love BCN » frappe là où ça fait sourire, et un peu mal. Le clip, publié début mars, cumule déjà plus de 76 000 vues sur YouTube et 228 000 sur Instagram.
Car dans le fond, les artistes dénoncent des faits bien réels : une augmentation exponentielle des loyers et des restaurants arnaqueurs avec des cartes uniquement en anglais proposant des sangrias pour 30 dollars. Effectivement, une partie culturelle de la ville est détruite, et Barcelone devient petit à petit une mauvaise copie d’un New-York low-cost.
Mais qui est à l’origine de l’augmentation des loyers et qui préparent dans les arrières-salles des restaurants de la mauvaise sangria attrape-touristes ? Ils s’appellent souvent plus Jaume et Jordi que Mike ou Peter. Même si des fonds d’investissements, depuis quelque temps, dévorent le marché immobilier. Il serait dommage que les Catalans, après avoir construit des murs pour les louer hors de prix, bâtissent désormais un mur mental pour s’isoler des néo-barcelonais qui sont, tout comme les locaux, amoureux de la ville. Tout le monde, d’où qu’il vienne, peut être porteur de richesses et de culture. Ça s’appelle tout simplement le vivre-ensemble.