En suivant la dynamique du Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez, la Catalogne a tout à perdre d’une rupture avec Israël tant la région commerce avec Israël. Avec une majorité très fragile en politique intérieure, le chef du gouvernement est à la tête de l’opposition européenne face à la guerre israélienne.
Tous les matins, en se levant, Pedro Sánchez semble chercher une idée anti-Israël pour faire la une de la presse. Ce week-end, la télévision publique, la TVE, restransmitrice de l’Eurovision, a provoqué un scandale en politisant, par la voix de ses commentateurs, la cérémonie musicale. Loin de l’univers d’un télé-crochet, les présentateurs espagnols sont partis dans une diatribe disruptive sur le nombre supposé d’enfants tués dans la bande de Gaza sous les feux israéliens. Ce qui a valu un avertissement des organisateurs de l’Eurovision. La veille, Pedro Sánchez a qualifié Israël d’État génocidaire. Aucun chef de gouvernement n’est allé aussi loin dans ses propos. Il est à noter que Sanchez, probablement pour satisfaire ses alliés d’extrême gauche, ne qualifie pas le gouvernement Nétanyahou de génocidaire, mais l’État hébreu lui-même de manière intrinsèque, presque fondamentale.
Salvador Illa, président de la Catalogne, fidèle ami et collaborateur de Pedro Sánchez , va dans la même sens et a annoncé ce mercredi la fermeture de l’agence représentant le gouvernement de Catalogne à Tel Aviv. Mission de cette agence : favoriser les liens économiques entre la Catalogne et Israël et soutenir l’implantation des entreprises catalanes dans la région. Et en faisant des gestes pour brouiller cette relation, Illa prend des risques, tant Israël est un superbe client de la Catalogne.
Malgré le conflit en cours à Gaza, les échanges commerciaux entre la Catalogne et Israël se poursuivent, et restent largement favorables à l’économie catalane. L’an dernier, les exportations catalanes vers Israël ont atteint près de 594 millions d’euros, soit plus du double des importations (254,7 millions), selon les données de l’Agència Catalana de Notícies. Un niveau quasi identique à celui de 2023, mais en deçà du record enregistré en 2022, avec 698 millions d’euros exportés vers l’État hébreu.
Des échanges fructueux
Inaugurée en 2015, l’agence catalane, qui porte le nom officiel d’Acció, avait été pensée pour faciliter l’implantation d’entreprises catalanes dans un pays alors perçu comme une référence mondiale en matière d’innovation et d’entrepreneuriat. Le secteur des semimanufactures reste la colonne vertébrale des échanges : il représente 41 % du volume commercial entre les deux territoires, avec 242 millions d’euros exportés et 108 millions importés. Viennent ensuite l’industrie automobile (17,9 %) et la machinerie (17,7 %). L’agroalimentaire, les manufactures, les produits énergétiques ou les matières premières représentent chacun moins de 10 % du total.
L’opposition, en Catalogne, voit dans cette décision un geste de politique politicienne n’ayant pour but que de soutenir, depuis Barcelone, un Pedro Sánchez en grande difficulté sur la scène intérieure. Sans véritable majorité et cerné d’affaires de corruption, entre son épouse Begonia et son ancien numéro deux, Jose Luis Abalos, tous poursuivis par la justice, Sanchez semble tenter une fuite en avant avec un positionnement géopolitique radical.
Concernant la fermeture de l’agence Acció, le chef de l’opposition Carles Puigdemont a publié sur X une dure sentence contre Salvador Illa : « Tout est sacrifié sur l’autel du maintien au pouvoir, pour mener à bien une stratégie claire : affaiblir la Catalogne, la réduire, la rendre banale, insignifiante, silencieuse, docile. La soumettre aux intérêts de l’Espagne et aux logiques partisanes. Ils sont venus pour finir le travail, précisément dans ce but. N’oublions jamais cela. »