Au MNAC de Barcelone, une expo pour honorer le professeur (oublié) de Joan Miró

Professeur de Miró, artiste accompli, ambassadeur de la catalanité et exilé de force, qui était Francesc d’A. Gali ? Le MNAC consacre une exposition au parcours de celui qui posa les premières pierres du noucentisme dans la région et peignit l’impressionnant dôme du palais national catalan.

Photos : MNAC

C’est l’un des plus grands pédagogues du noucentisme catalan. Et pourtant, presque personne ne connaît Francesc d’Assís Gali (1880-1965). Il a traversé le XXe siècle dans l’ombre, refusant de promouvoir sa propre œuvre. À croire que la discrétion était chez lui un art, jusqu’à ce que le MNAC répare aujourd’hui cet oubli. Sous la houlette du commissaire Albert Mercadé, l’exposition “Francesc d’A. Gali. Le maître invisible” exhume la figure d’un professeur de génie et d’un artiste discret, exilé par le franquisme.

Avant même d’entrer dans les salles, le bâtiment donne le ton : le dôme monumental du MNAC est signé Gali lui-même. Pendant six mois, il peignit perché à 30 mètres de hauteur.

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Mais l’exposition préfère l’intime au spectaculaire. Elle s’ouvre sur un volet biographique où l’on découvre un adolescent précoce, entré à la Llotja  (une école d’art barcelonaise) à 15 ans avec Picasso. C’est également le neveu de Pompeu Fabra, le père de la langue catalane moderne. À ses côtés, Gali fréquente l’intelligentsia barcelonaise et forge sa méthode.

L’influence d’Alexandre de Riquer, grand passeur du symbolisme britannique, l’ancre dans le noucentisme. Mais c’est comme enseignant que Gali marquera l’histoire de l’art catalan. Il ouvre en 1902 son école, dans laquelle Joan Miró passera et y apprendra les bases de sa pratique artistique.

Des exercices un peu spéciaux

L’accrochage, pensé comme un atelier, en restitue l’ambiance : structures en bois, photos d’époque, croquis, exercices étranges. Chez Gali, pas question de copier : les élèves dessinent de mémoire, les mains dans le dos, après avoir tâté un objet, ou bien ils gravent dans leur esprit les contours d’un paysage sans jamais prendre de notes.

L’exposition se poursuit en se concentrant sur la pratique artistique du Catalan, sur laquelle il se penche davantage lors de la fermeture de son école en 1915. Très intéressé par les posters, il en réalisa de nombreux, notamment pour les foires artistiques de Barcelone et l’exposition universelle de 1929. Il enseigne ensuite à l’école des Beaux-Arts catalans et dans sa pratique picturale, il montre un style méditerranéen, mettant en scène des femmes aux tons bleus, empreints de lyrisme.

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En 1939, le professeur est forcé à l’exil. Il quitte l’Espagne pour Londres, où il rencontre Ithell Colquhoun, une peintre surréaliste britannique qui l’initie à ce nouveau courant. Cette partie de son histoire – l’exil, Londres, la résistance au franquisme aussi, auquel il a participé – est raconté dans une exposition jumelle, présentée au MUME de La Jonqueira, jusqu’en juillet.

À Barcelone, on se concentre sur son parcours professoral. La visite est d’ailleurs agrémentée d’exercices interactifs, pour nous essayer nous aussi aux méthodes de Gali : on touche un objet sans le voir et on tente à l’aide de LED d’imaginer la silhouette d’une montagne.

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Cette exposition – un peu trop courte – est plus que nécessaire, pour remettre sur le devant de la scène un personnage important mais survolé de l’histoire de l’art catalane.

Jusqu’au 14 septembre au MNAC.

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