Dans la capitale catalane, 42% des chefs d’entreprise sont des femmes. Un chiffre de 10 points plus haut que la moyenne espagnole et européenne. Etat des lieux.
Photo : Clémentine Laurent
Au fond d’une cour du quartier Sant Gervasi, juste au-dessus de la Diagonal, plusieurs femmes poussent la porte d’un élégant bâtiment, ordinateur à l’épaule. A l’intérieur, un open space chaleureux déroule des tables où s’affairent des dizaines d’entre elles, parfois seules, parfois à plusieurs. La plupart sont entrepreneuses, toutes ont leur abonnement à la Juno House, mi-coworking mi-club spécialement pensé pour elles, depuis la garderie aux conférences, sessions de sports ou groupes d’entraide sur whatsapp.
Cet espace, unique en son genre, a été créé en 2022 par trois femmes, dont Liana Grieg. Pour cette Américaine qui a commencé sa carrière à New York, Barcelone était la ville idéale pour lancer ce type de projet. « Ici, j’ai toujours rencontré des femmes qui n’ont pas peur, c’est la ville des femmes courageuses« . Et depuis de très nombreuses années, les initiatives pour entrepreneuses ne manquent pas dans la cité comtale, en particulier autour des événements et des rencontres.
Juno House – Photo Meritxell Ribe
« Il y a beaucoup d’initiatives rien que dans la communauté française, avec le club des entrepreneuses, le groupe She for SHE ou même la Chambre de commerce et la French Tech qui organisent des sessions pour les femmes », confirme Elyse Sene-Scheidt, membre de la Juno House et entrepreneuse française. Elle est arrivée en Espagne il y a 7 ans en tant que freelance, avant de lancer l’agence de relations presse AgilesRP entre Paris et Barcelone. « C’est un environnement très stimulant et beaucoup plus international qu’à Paris, cela t’ouvre de nouvelles opportunités : grâce à des partenaires que j’ai rencontrées à Barcelone, je travaille maintenant avec des clients allemands, américains, anglais ».
Une forte communauté internationale
Car si Barcelone est une ville audacieuse, comme le rappelle Liana Greg, elle est aussi portée par un large mouvement de profils internationaux. A Barcelone, 4 entrepreneuses sur 10 sont étrangères, un chiffre qui se reflète dans les inscriptions à la Juno House, dont 40% des membres ne sont pas espagnoles. « C’est une ville très ouverte avec un esprit d’entreprise très fort et ce mélange des cultures apporte beaucoup ». Mieux, ces caractéristiques se démultiplient dans un environnement 100% féminin selon l’Américaine. « Il y a une solidarité naturelle très belle, un altruisme, une sororité et une vraie envie d’aider, sans histoire d’ego ».
Liana Grieg
Les femmes qui entreprennent sont ainsi de plus en plus nombreuses à Barcelone, portées sans doute par toutes ces initiatives qui voient le jour année après année dans la ville. En témoigne le nombre croissant d’entreprises qu’elles dirigent mais aussi leur visibilité dans les conférences, les salons internationaux, les médias et les événements qui comptent.
Elles font tomber peu à peu toutes les barrières dans un monde traditionnellement réservé aux hommes. Toutes, ou presque. Les investisseurs, eux, restent frileux. Seul 2% du capital risque investi l’année dernière l’a été dans des entreprises dirigées par des femmes. En cause, selon le World Economic Forum, des préjudices sexistes qui ont la vie dure et le manque de femmes investisseuses. Une étude de l’Université de Harvard a révélé que pour un projet identique, 70% des investisseurs préféraient miser sur des entrepreneurs masculins.
Les freins sont donc encore nombreux pour les entrepreneuses, mais Barcelone se veut une locomotive pour celles qui osent selon Liana Greg. « Il y a toujours du travail à accomplir, et nous ferons partie du changement ».
