L’Espagne est bloquée

Les élections du 26 juin était un nouvel espoir pour sortir l’Espagne de la crise politique et du blocage institutionnel dans lequel se trouve le pays depuis six mois. Les résultats de ce nouveau scrutin diffèrent finalement très peu de celui de décembre dernier.

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Source : El País

Pas sûr que l’élection de ce dimanche 26 juin permette à l’Espagne de voir la lumière au bout du tunnel politique. Si à 20h, un sondage sorti des urnes annonçait un triomphe de Podemos qui dépassait le parti socialiste, au fil du dépouillement des urnes, ce fut la douche froide pour la gauche radicale. Les résultats officiels sont moins flatteurs. La gauche contestataire reste bel et bien derrière le parti socialiste avec ses 71 députés, face aux 85 élus PS. Globalement, le résultat est peu différent de celui de l’élection de décembre dernier. La coalition Podemos et les communistes obtiennent exactement le même nombre d’élus qu’en 2015, tandis que les socialistes perdent 5 sièges.

La droite de Mariano Rajoy renforce quant à elle ses positions avec 137 élus (+14) en reprenant des voix aux centristes de Ciudadanos qui perdent 8 sièges en ayant 32 élus. Si le bloc de droite gagne des voix, ça ne suffit toujours pas à former un gouvernement. Pour que l’Espagne puisse avoir un exécutif stable, il faudrait qu’une majorité de députés votent pour élire un chef de gouvernement. Le bloc conservateur (le parti populaire + Ciudadanos) obtient 169 élus et le bloc de gauche (socialistes et Podemos) 166.

Pour le moment, Ciudadanos ne souhaite pas soutenir le PP et Podemos ne veut pas appuyer les socialistes. La situation de blocage peut donc durer dans le temps, certains observateurs n’excluent pas un troisième scrutin d’ici six mois. Pour le moment, et comme depuis décembre, c’est Mariano Rajoy qui reste chef du gouvernement par intérim.

Trois scénarios possibles

Trois chemins sont possibles à partir de ce soir. Celui qui est souhaité par les pays européens mais pas forcément par les Espagnols : l’impopulaire coalition gauche-droite avec les conservateurs du PP et les socialistes, éventuellement rejoint par les centristes de C’s. Une hypothèse qui se trouve renforcée avec le (relatif) bon score du Partido Popular. Mariano Rajoy, fort de sa victoire, va mettre la pression sur le leader socialiste Pedro Sánchez, pour que celui-ci accepte cet accord qu’il refuse depuis décembre. Le PP va utiliser comme argument l’instabilité provoquée par le Brexit, pour appeler à la stabilité de l’Espagne qui passe, selon les conservateurs, par cette grande coalition. Le parti socialiste pourrait aussi faciliter un gouvernement conservateur en s’abstenant lors du vote d’investiture.

L’autre scénario possible, c’est l’arrivée de Podemos au pouvoir dans une coalition progressiste englobant les socialistes et les indépendantistes catalans. Un scénario à la grec qui jette un froid dans les secteurs boursiers et entrepreneuriaux. Un possible accord à nouer qui n’a rien de simple. Hormis le fait que le leader socialiste Pedro Sánchez déteste personnellement le chef de Podemos Pablo Iglesias et réciproquement, les deux formations n’ont pas grand chose en commun. Les socialistes sont un parti de notables, plutôt embourgeoisés et centristes. Podemos au contraire est un mouvement né « de la rue », issu du phénomène des Indignés. Effrayés par l’idée de Podemos d’autoriser un référendum indépendantiste en Catalogne, la puissante vieille garde du parti socialiste empêche pour l’instant tout accord avec la gauche radicale. Un comité fédéral devrait toutefois se tenir cette semaine pour évoquer l’alliance avec le parti anti-austérité.

Troisième voie, que le blocage politique et institutionnel perdure, qu’aucun gouvernement ne soit formé et qu’une troisième élection législative soit convoquée avant la fin de l’année.

Pas de surprises en Catalogne

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© M. Simonin/Equinox

En Catalogne, les résultats sont aussi plus ou moins les mêmes qu’en décembre 2015. Les deux frères ennemis de l’indépendantisme, la gauche de ERC et les centristes de CDC, comptaient sur ce scrutin pour mesurer leurs forces. C’est peine perdue : non seulement les partis sont quasiment à égalité avec 9 élus contre 8, mais ils obtiennent exactement le même résultat que lors de la précédente élection.

Comme en 2015, Podemos est le parti qui arrive en tête en Catalogne, fort de son alliance avec En Comú, la formation de la maire de Barcelone Ada Colau. La coalition a su habilement surfer sur la vague identitaire catalane en promettant la tenue d’un référendum indépendantiste si le parti arrive au pouvoir, sans toutefois se prononcer sur l’indépendance.

Conciliabules, négociations de couloir et tête-à-tête devraient donc continuer dans les prochaines semaines en Espagne.

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