Barça – Un leader en crise

Samedi soir le F.C. Barcelone prenait la tête du championnat d’Espagne tandis que le public du Camp Nou réclamait la démission de son président. Surprenant alors que la Juventus se présente ce soir à Barcelone pour le début de la Ligue des Champions 2017-2018.

Photo:OG/Equinox

Imaginez les supporters du PSG demander la démission de Nasser Al-Khelaïfi au Parc des Princes tandis que l’équipe en met 5 à l’adversaire et que Neymar, la recrue la plus chère de l’histoire du football, offre des buts en veux-tu en voilà à ses coéquipiers. C’est ce qui arrive en ce moment en Catalogne au F.C. Barcelone.

Samedi soir au Camp Nou, alors que le Barça menait 5-0 contre l’Espanyol de Barcelone, une bonne partie du public se mit à scander en fin de rencontre « Bartomeu démission » alors qu’il venait de voir un bon match et la première passe décisive du Français Dembélé, la recrue la plus chère de l’histoire du F.C. Barcelone. Des centaines de socios firent même la queue à l’extérieur du stade une fois le match fini pour apporter leur soutien à la motion de censure visant le président du Barça alors que dans le même temps leur équipe prenait la tête du championnat avec 4 points d’avance sur le Real Madrid.

Le Barça condamné

Tout a commencé en juin 2016. Les services juridiques du F.C. Barcelone acceptent que le club soit condamné pour deux délits fiscaux et une amende de 5,5 millions d’euros dans le cadre du transfert de Neymar depuis le Brésil vers la Catalogne. Une décision inédite et qui étonne puisqu’en même temps le président Bartomeu et l’ex-président Rosell sont blanchis. Ils risquaient respectivement deux et sept ans de prison et une amende de 4 et 25 millions d’euros.

A ce moment-là, la contestation se fait du bout des lèvres alors que c’est une décision grave. Le F.C. Barcelone peut désormais disparaître s’il est de nouveau condamné. Mais l’équipe de football vient de remporter le Championnat et la Coupe d’Espagne, un an seulement après avoir fait le triplé. Et quand le ballon rentre, tout va bien pour les socios du Barça, alors que les germes du problème poussent déjà: le F.C. Barcelone préfère acheter six joueurs pour 122 millions d’euros plutôt que d’utiliser des joueurs issus de son centre de formation. La communication du club ne tourne qu’autour de Messi, Suarez et Neymar, réduisant par la même occasion l’institution de 116 ans à la seule MSN. Le président, qui a demandé personnellement aux socios de voter pour le contrat de sponsoring du Qatar, prend aussi la direction économique du club après la démission de Susana Monje, rattrapée par l’Unité des Délits Economiques et Fiscaux (UDEF) pour des affaires qui la lierait à un des enfants de Jordi Pujol.

Neymar, la goutte d’eau qui fait déborder le vase

Un an plus tard, tout éclate. Sportivement l’équipe de football ne gagne qu’une Coupe du Roi alors que le Real Madrid remporte la Liga et la Ligue des Champions.  La section de basket connait l’une de ses années les plus noires, faute de décisions claires. L’ex-président du Barça Sandro Rosell est incarcéré dans le cadre du FIFAGate le 25 mai. L’ancien candidat à la présidence Benedito profite de ce moment de flottement pour lancer le 8 juin un projet de motion de censure contre le président Bartomeu.

Les socios du Barça sont en effet habilités à voter tous les six ans leur président mais aussi à le destituer. Ils sont actionnaires à but non lucratif du club, un fait unique dans le monde à ce niveau. Seuls le Real Madrid et l’Athletic de Bilbao ont la même structure sociale. Les autres équipes ont un propriétaire qui a acheté leur club. La motion de censure a toutefois peu de chance de fonctionner. C’est le départ de Neymar qui va faire déborder le vase.

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Motion de censure contre Bartomeu

« Neymar reste à 200% ». L’affirmation de Jordi Mestre, vice-président responsable de la parcelle sportive du F.C. Barcelone, le 19 juillet dernier est déjà devenue l’une des pires cagades de l’histoire du club. Marcelo Bechler, journaliste de la chaîné de télé brésilienne Esporte Interativo, avait lancé la veille la bombe: Neymar allait quitter la Catalogne pour rejoindre Paris. L’information allait se confirmer trois semaines plus tard avec la signature du Brésilien au Paris-Saint-Germain. Les dirigeants du F.C. Barcelone n’avaient rien vu.

Ils ont bien essayé de faire passer Neymar « pour le méchant qui s’en va alors que le Club lui avait tout donné » en filtrant notamment qu’il allait toucher 26 millions d’euros de prime de prolongation de contrat signée l’an dernier deux jours avant de partir. « Aucun joueur n’est au-dessus du club » a assuré Bartomeu devant l’assemblée générale des Penyas le 7 août. « Nous avons eu tort de faire confiance à Neymar et son père » a-t-il renchéri la semaine dernière dans Sport. Problème, les joueurs n’ont pas du tout, mais alors pas du tout soutenu leur président. C’est d’abord Piqué qui a annoncé le 12 août savoir depuis le mariage de Messi, c’est-à-dire le 30 juin, que Neymar quitterait le Barça. « Ce n’était pas à moi de le dire au comité directeur » s’est-il justifié pour expliquer son silence avant de défendre le Brésilien contre vents et marées: « s’il avait envie de partir pour de l’argent, et bien c’est son droit ». 10 jours plus tard, le Brésilien vient passer un après-midi dans la Ciudad Condal pour voir ses amis du Barça. Tous postent sur Instagram des photos montrant à quel point ils s’apprécient. « Il est revenu » écrit même Messi en se moquant de Piqué et son fameux « il reste ». L’Argentin, consciemment ou non, ridiculise alors un peu plus Bartomeu et ses directivos puisque le F.C. Barcelone annonçait deux heures plus tôt qu’il réclamait à Neymar la fameuse prime de 26 millions d’euros.

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Enfin la direction sportive s’est couverte de gloire lors du marché des transferts. A la recherche du remplaçant de Neymar, elle jetait son dévolu sur Dembélé pour 105 millions d’euros fixe + 42 de variables, et promettait de faire venir « un ou deux joueurs » en plus en fin de période de transferts. Mais personne n’est venu. Le Barça avait pourtant proposé 160 millions d’euros à Liverpool pour faire venir Coutinho, mais les Anglais ont dit non. Pour la première fois, le Barça s’est heurté à plusieurs clubs aussi voire plus puissants financièrement que lui, sans nécessité de vendre pour équilibrer ses comptes. Liverpool est propriété de l’américain Fenway Sports Group, alors que le PSG appartient au tout petit mais tout puissant Qatar.

Bartomeu est entre les mains de l’équipe de football

Là, les socios ont vu rouge. Voir leur club se faire ridiculiser par des nouveaux riches et ne pas avoir de plan B en a ulcéré bon nombre. Selon la presse catalane, Bartomeu se préparerait à faire rouler des têtes. Mais pas tout de suite car le président affronte au moins jusqu’au 19 septembre une motion de censure. Un changement dans l’organigramme sportif, on parle notamment dans la presse catalane de la destitution de Jordi Mestre, serait prise pour aveu de faiblesse.

Benedito tente lui de recueillir 16.570 signatures de socios, soit 15% de ceux autorisés à voter. Il faut avoir au moins 18 ans et un an d’ancienneté pour voter. S’il y arrive, tous les socios seront appelés aux urnes pour décider s’ils conservent ou non leur président. Il serait destitué s’il obtient plus de 66% de votes contre lui. L’entreprise est cependant herculéenne. 16.570 signatures en 14 jours, c’est une moyenne de plus de 1.000 par jour avec seulement deux points de rencontres en dehors des matchs. De plus, pendant ce temps là, l’équipe de football prend ses marques et réalise l’un de ses meilleurs débuts en Liga. Bartomeu prie lui pour que le ballon rentre et que les esprits s’apaisent. « Nobita », surnom que lui ont donné les joueurs en référence au personnage de Doraemon, a le pouvoir mais pas l’autorité. Seuls les résultats sur le terrain peuvent la lui apporter.

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