Jose Miró : « Avec le Covid, le CDI va disparaître en Espagne »

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Jose Miró est expert en ressources humaines et organisation du travail à Barcelone.  Le point sur le marché de l’emploi et l’économie durant la crise du Covid en Espagne. 

Est-ce toujours intéressant pour un Français de venir travailler à Barcelone ?

Bien sûr. Le coût quotidien de la vie et les loyers sont moins chers qu’en France. Surtout si l’on compare avec Paris. Évidemment le secteur du tourisme est profondément et durablement touché. Mais tout n’est pas négatif. Il n’y a pour le moment ni crise financière ni guerre, qui auraient détruit toute l’économie.

La machine est prête à fonctionner. Un confinement comme celui du mois de mars dernier se traduirait par l’effondrement de l’économie. Mais si il n’y a pas de confinement, la situation va redémarrer petit à petit à partir de janvier prochain.

Un certain nombre de Français viennent à Barcelone et deviennent travailleurs indépendants (autónomos) ou créent une entreprise. Demain ça sera toujours possible ? 

Il y a évidemment un risque à calculer avant de lancer un tel projet, mais oui bien sûr c’est possible. D’ailleurs, le travailleur indépendant à de l’avenir devant lui.

Les grandes entreprises du secteur privé vont licencier massivement et à terme le CDI disparaîtra en Espagne. Les grandes boîtes auront donc besoin de sous-traiter et proposeront des marchés aux autónomos. C’est d’ailleurs ce qu’il se passe déjà dans le secteur des nouvelles technologies.

Un jeune qui sort de l’école en Espagne ou en Catalogne peut-il trouver du travail ?

C’est difficile. Le chômage augmente et va continuer en ce sens. D’ailleurs, les étudiants qui se retrouvent sur le marché du travail feront automatiquement grimper le chômage.

Pour résoudre le problème il va falloir être polyvalent. Un employé aujourd’hui doit savoir faire au moins quatre tâches différentes. C’est aussi ce que doivent faire les personnes au chômage : se former, se reconvertir, être toujours plus polyvalent.

On a connu la génération boulot, métro, dodo avec les habitants des grandes villes qui se levaient tôt pour aller travailler ; qui déjeunaient rapidement le midi et rentraient tard chez eux le soir. Est-ce que les personnes qui travaillent à domicile accepteront de revenir à une cadence infernale ?

On passe en effet du « métro, boulot, dodo » au « travail en pantoufle ». C’est un changement total qui se poursuivra après la crise du Covid. C’est une nouvelle société. Un changement anthropologique. D’ailleurs je conseille aux propriétaires de bureaux à Barcelone de les convertir en logement. C’est un projet dont on parle pour la Défense à Paris. On doit faire la même chose à Barcelone. On a besoin de loger les gens et moins les entreprises. Près d’un employé sur trois en Espagne restera en télétravail à long terme.

On parlait de la génération métro boulot dodo, est-ce qu’il y a une génération Covid ?

Oui et on pourrait comparer la génération Covid avec la 5G. Le nom complet c’est 5e génération. Ce progrès technologique permet une transition plus exacte et plus rapide des données. Avec la 5G, la voiture sera autonome.

Il en va de même avec les employés qui travaillent à domicile. Le patron n’est plus comme une poule avec ses poussins, et l’employé devient totalement autonome. Comme je disais c’est un changement profond qui va s’installer dans la durée. Récemment le patron de Google a dit a ses 400.000 employés dans le monde : « restez chez vous, je ne veux plus vous voir avant juillet ».

N’est-ce pas un problème de ne plus avoir de pause café avec ses collègues ?

La sociabilité est très importante, mais le Covid est un virus qui s’attaque à la sociabilité. On a trouvé d’autres possibilités comme les réunions virtuelles avec la plateforme Zoom. Mais il est vrai que ce n’est pas pareil. C’est fade.

Le gouvernement espagnol a-t-il fait les bons choix dans le domaine du travail depuis le début de la crise ?

Je crois que oui. Beaucoup critiquent, mais le gouvernement ne pouvait pas faire autrement que d’improviser dans cette crise totalement insolite.

On peut comprendre la colère des personnes qui ne perçoivent pas leurs allocations chômages (ERTE) en raison d’un chaos administratif.

Ce sont les banques qui auraient dû et qui devraient avancer l’argent à ces personnes. On ne manquera jamais d’argent en Espagne car il y a le soutien sans faille de la Banque Européenne et le plan de relance est particulièrement favorable à notre pays.

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