Covid Espagne : les soignants sur la corde raide

système de Santé en Catalogne

Covid Espagne. Depuis bientôt un an, le personnel soignant hospitalier fait face à la pandémie de coronavirus. Entre saturation des hôpitaux, pics de contaminations et vagues de Covid-19 à répétition. Comment les infirmiers gèrent-ils la crise ? Equinox fait le point. 

Alors que l’Espagne subit la troisième vague de Covid-19, le personnel de santé est épuisé. Et pour cause, l’importante charge de travail en continu, la pression et les nombreux soignants contaminés alimentent ce climat d’épuisement collectif. À ce jour, 2 200 infirmiers à travers le monde sont décédés après avoir été contaminés par le virus. En Espagne le bilan reste moins dramatique, « 9 soignants sont morts du Covid dans le pays » assure Florentino Pérez Raya, président Conseil Général des Infirmiers espagnol (CGI).

Néanmoins, la santé mentale du personnel ne bénéficie guère d’un tel bilan. Une étude menée par le CGI montre qu’entre 60 et 80 % des infirmiers du pays souffrent d’anxiété et d’épuisement lié à leurs conditions de travail. Fort de ce constat, quel est l’état de la santé mentale du personnel soignant à Barcelone ?

« On tient le coup car être infirmière est avant tout une vocation »

Au sein du centre hospitalier Pere Virgili, Winnie Ngoune, 32 ans, exerce le métier d’infirmière. Elle était présente dès la première vague du virus. La trentenaire originaire du Cameroun se charge principalement des gardes de nuit. « Je tiens le coup car être infirmière est une vocation, affirme-t-elle. « Je pense qu’il n’y a pas grand monde qui pourrait supporter une telle charge de travail avec une telle pression surtout dans la situation actuelle. » 

winnieDans son service, de nombreux infirmiers souffrent d’anxiété et d’épuisement. « Certains sont même sous traitement » confie Winnie. La surcharge de travail en continu a déclenché des situations graves et inquiétantes de stress. « Je me souviens le cas d’une collègue qui avait été testée positive lors de sa garde de nuit, raconte l’infirmière, installée à Barcelone depuis dix ans.  « Elle ne pouvait plus rentrer chez elle car elle vit avec ses parents âgés. Elle a ensuite fait une crise d’angoisse terrible. On a dû prendre soin d’elle comme patiente » se remémore-t-elle.

« Surmonter la pandémie, c’est avant tout prendre soin de la santé mentale de nos soignants, un élément clé de la lutte contre le Covid-19 » estime Florentino Pérez Raya président du CGI.

Des programmes de soutien psychologique

Selon Pérez Raya, des programmes de soutien à la santé mentale des professionnels ont été mis en place partout en Espagne. Cette initiative a vu le jour dans les centres hospitaliers via les services de prévention des risques professionnels. « Des programmes d’aide psychologique ont également été mis en œuvre dans les école d’infirmières ainsi que des ateliers de formation pour faire face aux situation de stress au travail » précise le président du Conseil Général des Infirmiers.

Toutefois, Winnie Ngoune n’a pour l’instant pas assister à ce genre de programme dans son hôpital barcelonais car ils n’ont pas encore été mis en place. Elle espère d’ailleurs en voir très bientôt. « En ce moment, le personnel se débrouille tout seul pour régler ces problèmes d’anxiété » déplore-t-elle. « En revanche, des formations pour gérer la motivation au travail du personnel ont eu lieu ces derniers mois ».  

Le métier d’infirmier déserté ?

Selon le communiqué du Conseil International des Infirmiers (CII), 10 à 15 % d’infirmiers auraient quitté la profession à travers le monde. Toujours d’après le CII, d’ici 2030, le secteur de la santé compterait un déficit de 14 millions d’infirmiers. Des estimations qui inquiètent le président du CII, Howard Catton : « Un tel déficit affecterait tous les services de santé dans une ère post-pandémique ». Cependant, côté espagnol, le président du CIE nuance. « Depuis le début de la crise, moins d’1 % des infirmiers ont démissionné en Espagne, on ne peut pas parler d’exode de la profession même si les conditions actuelles sont compliquées ».

Même constat pour l’infirmière Winnie Ngoune : « À l’heure actuelle, beaucoup de secteurs ont été fragilisés par la pandémie. Certaines personnes entrevoient une sortie économique dans le monde de la santé. Il y aura toujours de l’emploi dans ce secteur. Et puis, poursuit-elle, il n’y a pas que le Covid dans les hôpitaux, il y a aussi d’autres maladies qui continuent à infecter la population. Le Covid est venu s’ajouter et a bouleversé dans notre quotidien. Mais on a toujours des patients ici pour des maladies cardiaques, des cancers, des maladies osseuses, etc. C’est pour cela que je ne m’en fais pas pour le métier d’infirmier. »  

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