L’Espagne balaie les restes du Franquisme

Franquisme espagne

Le Parlement espagnol a voté en fin de semaine une nouvelle loi dite de « mémoire historique » visant à défaire les vestiges de la dictature franquiste. 

47 ans après la mort du dictateur, l’Espagne tente de tourner la page de l’ancien régime. Une loi datant de 2007 présentée par le gouvernement socialiste de José Luis Zapatero avait déjà considérablement réduit l’héritage des années de pouvoir franquiste. Les statues, noms de rues à la gloire de Franco et ses amis ont du être respectivement déboulonnées et renommés.

Le 15 février 2019, le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez à son tour, ordonna l’exhumation du corps de Franco qui reposait dans la pharaonique Valle de los Caidos de Madrid pour le déplacer dans un cimetière privé.

Sous l’impulsion de la coalition gouvernementale composée des socialistes et de la gauche radicale de Podemos, un nouveau texte de loi sur la mémoire démocratique a été approuvé cette semaine par le Parlement et va plus loin dans la suppression des vestiges franquistes.

L’apologie du franquisme illégale

Un des principaux axes de la loi est de rendre illégal le franquisme. « L’exaltation personnelle ou collective du soulèvement militaire, de la guerre ou de la dictature ou de ses dirigeants » sera desormais passible de poursuites. Par ailleurs, la fondation Franco qui a pour objectif de faire perdurer l’œuvre de l’ancien chef d’État espagnol sera dissoute dans un délai d’un an après l’entrée en vigueur de la loi.

La Valle de los Caidos débaptisée

La Valle de Los Caidos, oeuvre majeure construite dans la banlieue de Madrid sur ordre de Franco pour accueillir sa dépouille et glorifier le régime à travers les âges va être débaptisée. Valle de Cuelgamuros sera le nouveau de qui sera un « lieu de mémoire démocratique » selon le texte de loi.

El Valle de los Caídos pasará a llamarse Valle de Cuelgamuros

La réparation pour les victimes

Selon la loi, toutes les victimes du franquisme « ont droit à la reconnaissance et à une réparation intégrale par l’État ». Cependant, il n’est pas encore précisé les modalités pratiques. Par ailleurs, l’État sera plus actif dans la recherche des corps des victimes enterrés dans des fosses communes afin de leur donner une sépulture décente.

La perte des titres de noblesse issus du franquisme

Jusqu’à pratiquement sa mort en 1975, Franco créa et accorda 37 titres de noblesse à des hommes d’affaires, des hommes politiques et des militaires proches du régime. La dictature a ainsi créé sa propre intelligentsia dans la haute société espagnole. La nouvelle loi fait perdre aux actuels propriétaires leurs titres de noblesse.

Franco a accordé 17 titres de noblesse à des militaires. L’un des plus importants est le général Emilio Mola, l’un des principaux commandants du coup d’État de 1936. Son petit fils est actuellement le titulaire du duché de Mola. Une autre déchéance sera celle du militaire Juan Yagüe, du groupe des africanistes et légionnaire qui s’est battu contre la classe ouvrière en 1934 lors de la révolution dans les Asturies à la demande du gouvernement républicain. Désormais, le titre de deuxième marquis de San Leonardo de Yagüe est détenu par par Juan Yagüe, dont la sœur, María Eugenia a participé à plusieurs débats télévisés pour défendre le franquisme. Juan Antonio Suanzes, directeur de la publicité du groupe progressiste Prisa qui édite notamment le journal El Pais, perd le titre accordé à son père.

Au niveau du monde des affaires, le cas le plus notable est celui de José María Arias Mosquera, le dernier président de Banco Pastor avant son absorption par Banco Popular. Santiago de Ybarra est actuellement président d’honneur du groupe Vocento, propriétaire du journal conservateur ABC et se trouve aussi affecté par la mesure.

La polémique de la transition pacifique.

La transition de la dictature vers la démocratie en Espagne a longtemps été saluée, à l’intérieur du pays comme au-delà des frontières. En effet, l’Espagne est l’un des rares pays a avoir réussi ce passe d’un régime à un autre sans faire couler le sang et en taisant les armes. Grâce notamment à la loi d’amnistie. Avec ce texte, nul ne peut être poursuivi pour ses actes durant les 40 ans de dictature, que ce soit un franquiste ou un opposant. Une mesure qui a permis une certaine concorde et une relative réconciliation dans les deux camps. Un texte quasiment sacré que personne n’a voulu remettre en question, jusqu’au milieu des années 2010.

L’irruption de la gauche radicale en Espagne (Podemos) et des indépendantistes catalans ont emmené une sévère critique de la transition espagnole pour avoir permis que les anciens franquistes furent blanchis et puissent continuer à agir dans la société espagnole.

Podemos a poussé, contre l’avis des socialistes, pour que l »amnistie soit fragilisée à travers la nouvelle loi. L’article 2 souligne que « toutes les lois de l’État espagnol », y compris la loi d’amnistie, « seront interprétées et appliquées conformément au droit international », selon lequel « les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, le génocide et la torture ont le considération imprescriptible et non amnistiable » 

En raison de cette polémique, la droite du Partido Popular et l’extrême-droite de Vox ont voté contre la loi.

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