A Barcelone, l’essor vertigineux des espaces de coworking

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La capitale catalane se hisse dans le top 3 européen des villes hébergeant le plus d’espaces « flexibles », derrière Paris et Madrid. Preuve de son dynamisme pour les uns, un mirage pour les autres. Etat des lieux.

Photos : AC et Clémentine Laurent/Equinox

Poblenou un jeudi matin de février. Les tractopelles des éternels travaux du quartier tech 22@ croisent les startupers en trottinettes se rendant dans leur espace de coworking. A deux pas de la Torre Glòries, l’immeuble de Wojo coche toutes les cases du « flex office » cool : murs colorés, design soigné, babyfoot au rez-de-chaussée et terrasse aménagée en rooftop.

La marque française a choisi Barcelone pour ouvrir son premier édifice à l’étranger. Avec une ouverture début 2020, les débuts furent difficiles, mais 80% des bureaux sont maintenant occupés. Toujours pas assez toutefois, pour le directeur Fernando Sánchez-Crespo. « Nous sommes passés du Covid à la guerre en Ukraine, nous n’avons pas vraiment connu de normalité depuis l’ouverture », regrette-t-il. « Mais la flexibilité que nous proposons rassure justement les entreprises dans ce contexte« , complète Aurélie Dailloux, sous-directrice.

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Fernando Sanchez-Crespo et Aurélie Dailloux

Opter pour un espace flex, c’est la possibilité de s’installer immédiatement dans un bureau meublé et tout équipé, et pouvoir décider d’en partir d’un mois à l’autre. L’idéal pour les startups ou petites entreprises en phase de lancement et de croissance. C’est d’ailleurs le gros des locataires de Wojo. « C’est difficile de séduire les entreprises plus traditionnelles, pour qui avoir leurs propres bureaux reste un objectif », explique Fernando Sánchez-Crespo. Ce fut le cas d’H&M qui a loué un étage durant cinq mois en attendant de pouvoir intégrer ses locaux.

Plus beau, plus cher

« Les espaces de coworking coûtent aussi beaucoup plus cher », glisse le fondateur d’une startup qui s’apprête à prendre des bureaux après trois ans passés dans différents espaces flex. Dans un coworking barcelonais, il faut compter entre 250 et 400 euros par personne, soit une moyenne de 3000 euros pour un bureau de 10 personnes. Le double du prix d’un bureau trois fois plus grand sur le marché de la location classique, auquel il faut toutefois ajouter l’ameublement, l’énergie et la connexion Internet. « Un surplus qui est amorti dès le premier mois », a calculé le jeune dirigeant qui reconnait toutefois que le système du coworking est idéal pour commencer. « C’est génial au début, car c’est facile d’augmenter ton équipe d’un mois à l’autre, mais quand tu as atteint ta taille critique, ça ne vaut plus le coup ».

coworking francais barceloneQuid de l’ambiance colorée-cool digne de la Silicon Valley ? Un vrai plus selon Aurélie Dailloux : « les collaborateurs sont plus exigeants, travailler dans un endroit confortable, agréable, avec une terrasse, fait maintenant partie des critères de recherche d’emploi ». Un argument que ne renieront pas les deux trentenaires disputant une partie de babyfoot dans le lobby durant leur pause café. « C’est un super endroit, c’est vraiment agréable de venir travailler ici », confirme l’un d’eux.

Les entreprises de la tech y sont particulièrement sensibles. Mais voilà, le monde des startups va mal et de nombreux grands noms du secteur ont annoncé des vagues de licenciements. Dont cette semaine Glovo, qui incarnait la success story barcelonaise.

Une augmentation fulgurante

Les startups, grandes consommatrices de coworking, réduisent la voilure, et les collaborateurs se font moins exigeants. « Les vagues de licenciements, ce n’est bon pour personne », admet Fernando Sánchez-Crespo qui pense toutefois que le marché n’est pas encore arrivé à maturité et que Barcelone peut encore accueillir de nouveaux espaces flex.

Avec 212.000 mètres carrés, soit 21.200 postes de travail, la capitale catalane est la troisième ville européenne la plus fournie en la matière. Mais si on se penche sur le ratio bureaux traditionnels-espaces flex, c’est la championne avec plus de 3,3% du parc immobilier professionnel dédié aux coworking. Deux fois plus qu’à Madrid.

C’est déjà trop pour certains experts, qui craignent un effet bulle. Et une dégringolade prochaine. Mais les professionnels du secteur y croient et continuent de construire : + 30% de surface coworking à Barcelone en un an. “Il y a clairement un mouvement des entreprises et des employés vers les villes du sud de l’Europe pour leur qualité de vie, et Barcelone est bien placée”, conclut Fernando Sánchez-Crespo.

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