Le 1er-Mai moins massif en Catalogne qu’en France, la raison

1er-Mai Catalogne

Le 1er-Mai, Fête du travail, marque le coup d’envoi d’une journée de mobilisation en Espagne comme en France. Mais d’un côté ou de l’autre de la frontière, l’ampleur n’est pas la même. L’efficacité aussi. Explications.

Photo d’illustration

Fête du travail, en France. Journée internationale du travailleur, en Espagne. Des deux côtés de la frontière, le 1er-Mai est férié. Synonyme pour les deux de mobilisations sociales, mais un peu plus bruyantes pour l’une que pour l’autre. Car à Barcelone, par exemple, cette journée n’attire pas foule dans les rues. Ou du moins, pas de la même façon que chez son voisin français.

Parce qu’à la question « Pourquoi est-ce moins important en Catalogne, qu’en France ? », la réponse est ferme. « Aussi ici, c’est très important. Nous faisons toujours des manifestations », indique l’un des principaux syndicats espagnols, le CCOO. L’an passé, à Madrid, les syndicats chiffraient la mobilisation à 50 000 manifestants, contre 10 000 selon le gouvernement espagnol. Autant que l’estimation pour Paris, mais deux fois moins que celle comptée par le ministère de l’Intérieur français, qui dénombrait 24 000 personnes dans la capitale en 2022.

Néanmoins, pour une fois, la péninsule ibérique ne se laisse pas abattre en la matière. « D’ailleurs, année après année, on gagne en nombre d’affiliations. On dépasse la France », affiche fièrement Cristina Torre Lopez, en charge de l’action syndicale du CCOO de Catalogne. D’après l’enquête de Funcas, l’Hexagone possède l’un des taux de syndicalisation les plus faibles d’Europe, avec seulement 9 % de sa population adhérente, contre 15 % dans les années 80. Alors qu’au Pays de Cervantes, sur la période 2010-2018, 16 % des Espagnols étaient syndiqués. L’Espagne a donc, elle aussi, une carte à jouer. Plus discrete, mais tout aussi efficace, écrit le média El Diario.

Une mobilisation moins forte à cause du pont

« Les gens sortent dans la rue le 1er-Mai, mais ça dépend des problèmes du moment », explique Cristina Torre Lopez. Les Barcelonais sont généralement 40 à 50 000 à se réunir dans les rues de la capitale catalane, d’après le CCOO. Peu sûr qu’ils soient autant à se réunir ce lundi, à 11 h 30 sur la place d’Urquinaona, pour descendre la Via Laeitana, pancartes à la main.

La configuration actuelle n’est pas propice aux fortes mobilisations, selon la syndicaliste du CCOO. D’une part, parce que la politique gauchiste de l’Espagne et le dialogue social instauré avec les syndicats ont porté leurs fruits récemment sur la loi du travail, le SMIC et les retraites. Mais aussi, parce que cette année, le 1er-Mai tombe un lundi. « Ce sera un long week-end, donc, ce sera difficilement d’avoir beaucoup de monde cette année », admet la militante. Mais les deux syndicats majoritaires, l’UGT et le CCOO, gardent espoir.

blocage barceloneCar malgré tout, la date reste d’ampleur en Catalogne, et plus largement en Espagne. Car il s’agit de l’une des rares occasions où les citoyens peuvent manifester pour leurs droits et conditions de travail sans trop y perdre. « C’est ce qui nous différencie avec la France. Nous ne faisons pas de grève, parce que c’est coûteux. Les salaires moyens des Français sont plus élevés que ceux des Espagnols », explique Cristina Torre Lopez. Le Smic en Espagne représente 1 080 euros mensuels, contre 1 353 € en France. Ainsi, la Journée du travailleur représente une option, quasi unique pour les Espagnols, de faire entendre leur mécontentement, sans prendre de risques financiers. En ça, le 1er-Mai s’avère tout aussi emblématique ici, qu’en France.

La France (historiquement) présente pour manifester

Côté français, en revanche, le férié est très attendu auprès de tous. Si en Espagne, il est possible de dire que les années de mobilisation les plus denses s’étendaient entre 2012 et 2014, la France aurait presque du mal à choisir. Car dans l’Hexagone, le 1er-Mai, c’est sacré. La population manque rarement le rendez-vous et mène régulièrement la barque des grèves, tout en cultivant l’image révolutionnaire et revendicatrice des Français. « C’est une question de mentalité et d’histoire, cela n’a rien à voir avec les lois ou encore la force des syndicats, les syndicats peuvent être tout aussi puissants en Espagne », affirme Josep Miró, économiste et expert en organisation du travail, dans un article d’Equinox.

« Les Espagnols pensent qu’un emploi, même précaire, c’est mieux que d’être sans emploi, et je caricature mais en France c’est un peu le contraire, on préfère ne pas avoir d’emploi qu’avoir un emploi précaire, on ne veut pas renoncer aux acquis sociaux ».  Et cette Fête du Travail 2023 ne saurait que répondre à la coutume, après déjà plusieurs mois de manifestations et grèves contre la réforme anti-retraites. Quand les Catalans se posent la question du nombre de manifestants, les forces de l’ordre françaises, elles, se questionnent sur leurs tournants. Depuis la crise des gilets jaunes notamment, les violences font partie du lot. Alors dans la capitale tricolore, 5 000 policiers et gendarmes seront, à coup sûr, eux aussi, au rendez-vous. Question de culture ?

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