L’avenir incertain des agriculteurs de Catalogne

agriculteurs de Catalogne

La sécheresse en Catalogne frappe depuis plus de 30 mois. En première ligne, une profession en péril : agriculteur. Dans cette région d’Espagne à sec, l’avenir du métier semble peu à peu s’évaporer. En même temps que l’eau.

Photo : mairie de Barcelone

40 ans de culture, sur un fil. La production au compte-goutte. Et l’avenir de tout un métier en suspension. Ainsi se dessine, aussi flou soit-elle, la vie actuelle d’un agriculteur en Catalogne. Comme si nourrir 7,7 millions de Catalans ne relevait pas déjà d’un vaste défi, les cultivateurs font face à un obstacle de taille : une terre sèche. Le manque d’eau menace l’Espagne, et particulièrement cette région du nord de l’Espagne, à la frontière de la France, depuis plus de 30 mois. Et comme toute crise, elle ne met pas tout le monde sur le même pied d’égalité.

Le chanceux continuera à avoir suffisamment d’eau pour arroser ses semences. Il sera même, au mieux, situé au pied d’une source. Alors que d’autres subissent de plein fouet le manque d’or bleu. Pourtant, ils en ont connu bien d’autres des difficultés. La canicule en 2008, les grêlons, la peste des chenilles, le froid intense. La première sécheresse. Et puis l’actuelle, presque devenue « coutume ». À une nuance près : celle-ci est inédite. Extraordinaire par son imprévisible, force, incroyable par sa longévité. Mettant à rude épreuve la patience des paysans.

« Je ne sais pas combien de temps, on tiendra »

« Nous les agriculteurs, on regarde toujours le ciel », assurait Carlos Zaragoza, en mars dernier, au pied de ses légumes, à Nou Barris. Un léger sourire, nerveux. Car en haut, les nuages et gouttes de pluie jouent au chat et à la souris. Et pour l’instant, c’est la nature qui prend le dessus à Barcelone et en Catalogne. « Lors de la première sécheresse, toutes les tomates avaient cramé », se remémore Lluis Fisas, maraîcher à Molins de Rei.  Depuis plusieurs semaines, il est obligé de les arroser tous les jours, ainsi que les butternuts, avec de l’eau irriguée. « Je ne sais pas combien de temps, on tiendra ».

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Lui a suivi les pas de ses mères et grands-mères. Dans la province barcelonaise, il représente la quatrième génération d’agriculteurs. Il a décidé de passer en bio pour dépenser moins d’eau, et plus récemment encore, de changer de système de culture pour s’offrir une chance de perdurer. « J’ai avancé toutes mes plantations. Les courgettes, je les ai mises sous serres fin mars. Et pareil pour les tomates, je commencerai plus tôt, en prenant des variétés anciennes, plus résistantes », explique Lluis Fisas. L’entrepreneur fait son maximum et garde espoir sur le futur de l’agriculture. En changeant de fonctionnement et en ne labourant plus les terres, l’homme croit en un renouveau.

La mort lente et silencieuse des agriculteurs ?

Carlos Zaragoza, lui, sait déjà que ses enfants ne prendront pas le relais. Après 40 années de métier, désormais à l’aube de sa retraite, il avoue comprendre. « C’est compliqué aujourd’hui. Et puis, les gens ne veulent plus travailler dans les champs », regrette le passionné. Serait-ce donc l’illustration d’une « mort lente et silencieuse des paysans », telle que le titre le média El Nacional ?

Les adjectifs s’avèrent finement choisis. Car du côté des professionnels de la terre, c’est effectivement la solitude qui prime. Avec l’état d’urgence sécheresse, l’irrigation de l’eau en Catalogne a été limitée à 40 %, lors du premier trimestre de 2023. Un coup dur dans la profession, qu’illustre le pure-player catalan, en osant écrire qu’en politique, « on s’inquiète plus des villes que des paysans ». Contexte électoral oblige. Il reste, en revanche, une lueur d’espoir. Une aide venue tout droit du ciel. Depuis fin avril, la Catalogne connaît des épisodes de pluie ponctuelle. Cette semaine, le phénomène durera encore. De quoi sauver, un peu, la région de la sécheresse. Et ceux qui s’inquiètent de leur avenir.

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