L’étonnante histoire du tilde espagnol

Le tilde, ce son nasalisé symbolisé par une petite vague, est caractéristique de la langue espagnole. Au fil des siècles, il s’est même inscrit comme un logo que les Espagnols arborent fièrement. Mais d’où vient-il ?

Difficile de passer à côté du tilde ! En apprenant la langue espagnole, un petit signe en forme de vague, souvent placé au-dessus de la lettre « n » interpelle le regard. Ce symbole utilisé en transcription phonétique marque une nasalisation. En quelque sorte, il est l’équivalent du son « gn » en Français. Les amateurs de linguistique auront d’ailleurs remarqué que l’espagnol est l’une des seules langues européennes à utiliser ce signe en forme de « s » couché.

Origine grecque

Cette distinction si emblématique puise son origine dans la locution latine titulus. Elle signifie tout simplement « titre » en français. Dans l’empire romain, l’esclave portait un panneau autour du cou où était indiqué son rôle dans la cité avec la mention titulus. Plus tard, dans l’étude des écritures manuscrites gréco-latines, le titulus devenait un trait droit puis ondulé au-dessus d’un mot ou d’une lettre.

Cette annotation servait à signaler qu’une lettre avait été écartée pour économiser de la place dans un texte. Ce trait ondulé s’est ensuite imposé comme une abréviation dans les écrits latins, chez nos voisins les Goths et dans l’alphabet cyrillique où il répond au nom de titlo.

Transformation castillane

Les Espagnols ont fini par adopté le titulus tout en modifiant sa fonction dans un mot.  Auparavant, les scribes avaient pour usage d’indiquer un son « n » modifié en présence d’un autre « n ». Ces deux lettres côte à côte ont fini par donner la sonorité « gne ». Le ñ a ainsi fait son apparition. Peu à peu, ce phonème est devenu étranger au latin pour devenir 100 % ibérique. Si nous prenons un mot comme doña, il s’écrivait à l’origine donna. Le tilde, appelé aussi « métathèse », a donc été utilisé au détriment de la double consonne.

tildeLe titulus devenu tilde est dorénavant toujours marqué de cette manière : ñ. Le ñ est apprécié comme une lettre à part entière. Il se situe en quinzième position dans l’alphabet castillan qui comporte en tout vingt-sept lettres.

La France avait aussi son tilde

En France, le tilde a été employé jusqu’au XVIIIe siècle. Comme pour la langue latine, il signifiait une abréviation et un son nasalisé sur la lettre n. Dans le texte historique de 1539 jamais abrogé sur la réforme de la juridiction ecclésiastique, le tilde est présent à trois reprises. L’ordonnance de Villers-Cotterêts édicté par François Ier a gravé dans le marbre cette particularité qui signale un ancien n.

Les dictionnaires français contemporains présentent encore quelques mots avec le tilde. Sans surprise, ils renvoient à des mots d’origine espagnol comme doña, piraña ou señor. Néanmoins, depuis un rapport du Conseil supérieur français de la langue française, la francisation des locutions est recommandée et l’utilisation du ñ est tombée en désuétude.

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