Quand Barcelone était une ville de Peaky Blinders

Surnommée la Manchester espagnole, Barcelone a connu une forte industrialisation et des revendications sans précédent pendant l’entre-deux guerres. Une époque de violences et de crimes, qui rappelle étroitement l’histoire du célèbre gang de Netflix, les Peaky Blinders. 

Le succès planétaire de la série Peaky Blinders, sortie en 2013, a tourné tous les regards vers la ville industrielle de Birmingham, dans laquelle sévissait le groupe de gangsters aux bérets aiguisés. Pourtant, peu de gens savent que la capitale catalane a aussi été la cible de groupes armés durant les années 20. C’est le phénomène du «pistolérisme».

Les Peaky Blinders espagnols

Barcelone, 1917. Le climat de la Première Guerre Mondiale et les échos de la révolution russe forgent des revendications et des idées révolutionnaires en Espagne. Le mouvement ouvrier commence à s’organiser et élargit l’influence de ses syndicats, notamment la CNT, qui fait de la grève une constante du mouvement. Entre 1917 et 1923, pas moins de 300 grèves auront lieu au cœur de la capitale catalane.

Dans ce contexte de tensions et face à la montée du syndicalisme, certains patrons commencent à engager des hommes armés pour intimider les travailleurs et tuer les plus radicaux d’entre eux. La Banda Negra, un groupe de tueurs à gage recrutés par l’ancien commissaire Manuel Bravo Portillo est crée en 1919 pour servir le patronat. Une méthode à laquelle répondent les travailleurs en engageant à leur tour des membres de groupe armés. Les ruelles de Barcelone se transforment alors en un véritable coupe-gorge, fréquenté par des figures redoutables, les pistoleros.

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© Robert viglasky / Caryn Mandaba

Contrairement au célèbre gang de Birmingham, les pistoleros sont plus discrets. Pas de casquette aux lames aiguisées, ni de style vestimentaire reconnaissable, mais la même crainte que celle inspirée par la fratrie Shelby, dont les méthodes d’action traversent la Méditerranée au début du 20e siècle et inspirent d’autres groupes armés comme les Apaches à Paris et les pistoleros à Barcelone.

La capitale catalane devient peu à peu le Birmingham de la prohibition, avec deux camps opposés qui s’affrontent dans une violence inouïe. En 1919, alors que la grève de l’entreprise de la Canadiense paralyse la ville et la plonge dans l’obscurité, les tensions s’accentuent. L’inefficacité de la police barcelonaise entraîne la prolifération des agressions sociales et une forte dépendance à l’égard d’informateurs. Pour lutter contre le phénomène des pistoleros, une unité spéciale est créée avec à sa tête le commissaire Francesc Martorell,  rappelant intimement le rôle de l’inspecteur Campbell dans la série Peaky Blinders.

Barcelone, la Manchester espagnole

Si la capitale catalane reflète autant l’ambiance de la série à succès, c’est aussi pour son côté industriel. Des cheminées et des briques rouges qui font écho à l’architecture des villes anglaises de l’époque. Avec la révolution industrielle du XIXe siècle, un grand nombre d’usines sont construites, notamment au quartier de Poblenou, rebaptisé le « Manchester catalan ». Cependant, avec la crise du secteur textile dans les années 1960, les usines du quartier ont commencé à décliner. Elles abritent désormais des bureaux, des centres d’art ou des centres de formation.

poblenouÀ l’instar de Poblenou, reconnu pour ses activités industrielles florissantes, c’est le quartier du Raval qui se distinguait à l’époque par son triste record en matière de violences. Des lieux tels que le Parallèle, aujourd’hui prisé par les skateurs, constituaient alors l’épicentre des revendications il y a 100 ans. Une époque marquée par la contrebande et les activités criminelles, où chaque coin de rue aurait pu être le théâtre d’une rencontre avec le mystérieux Thomas Shelby.

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