Le ras-le-bol des routiers espagnols face aux blocages français

Les mouvements de contestations des agriculteurs français se poursuivent jour après jour. Outre les blocages sur les routes, des camions immatriculés à l’étranger sont arrêtés et vidés par les agriculteurs, provoquant la colère en Espagne. 

Image : copie d’écran Antena3

Camions attaqués voire brûlés, marchandises vidées et saccagées, c’est ce que vivent des chauffeurs routiers immatriculés à l’étranger, dont les Espagnols, lors de leur passage aux barrages de l’Hexagone. Les agriculteurs français multiplient les manifestations et blocages depuis deux semaines sur le territoire. La frontière franco-espagnole a été bloquée une première fois le 26 janvier, sur l’A9 entre Perpignan et l’Espagne, et des bouchons sont à nouveau survenus le 30 janvier. À ces ralentissements s’ajoute aussi le pillage de marchandises.

« Les pertes économiques s’élèvent à 12 millions d’euros par jour, sans compter les dommages causés aux camions et aux marchandises. Les chauffeurs professionnels vivent des situations tendues et leur sécurité est menacée » a déclaré la confédération espagnole des transports de marchandises dans un communiqué publié ce mardi. En effet, la veille, elle expliquait que la France étant la voie de sortie vers d’autres pays tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni, pas moins de 20 000 camions franchissent la frontière française chaque jour. Les pertes sont estimées à 600 euros/jour par camion.

Les chauffeurs routiers espagnols souhaitent mettre le holà. L’un d’entre eux, Vicente Cañizares, témoignait auprès d’Antena 3 qu’un « chauffeur indépendant ne peut pas rester chez lui, il doit sortir pour payer ses frais. Quand on brûle un camion, on détruit la vie d’un indépendant. Je comprends qu’ils veuillent manifester, mais (…) il faut qu’ils trouvent une solution le plus vite possible pour tous ». 

Des produits jugés de « concurrence déloyale »

Les agriculteurs s’en prennent aux camions étrangers suite aux propos du Premier ministre français. Gabriel Attal a déclaré dimanche vouloir « faire face à la concurrence déloyale » de l’Union européenne, lors d’une visite d’une exploitation agricole en Indre-et-Loire. L’Espagne n’a pas été citée explicitement, mais « des pays voisins ». Il n’en fallait pas plus pour mettre le feu aux poudres. Des manifestants se sont plaints de l’importation de fruits et légumes espagnols en France, dont les prix sont plus bas.

blocage FranceConcrètement, les normes du secteur de l’Union européenne sont valables pour tous les pays membres. Chacun est libre d’imposer des mesures supplémentaires au sein de ses frontières, comme le fait la France. Le gouvernement a interdit certains produits phytosanitaires, qui restent autorisés ailleurs.

Mobilisations prévues en Espagne

En réponse à ces événements, le ministre de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation espagnol n’a pas mâché ses mots, jugeant les attaques “absolument inacceptables”. Il a déclaré lors d’un événement à Madrid ce lundi que « les règles de production et de commercialisation dans l’UE sont similaires dans tous les États membres et nous les appliquons tous de la même manière, de l’Allemagne à l’Espagne, en passant par le Portugal, les Pays-Bas et l’Italie. (…) Par conséquent, il n’y a pas d’avantage concurrentiel résultant de l’application de règles différentes ».

Le ministre a précisé qu’il « respecte pleinement le droit de manifestation et d’expression » et qu’il demande également « le respect des personnes et des biens ». Il a également contesté en disant que « les produits espagnols sont excellents et gagnent du terrain en termes de qualité et de compétitivité. »

Les différents acteurs restent dans l’attente de l’évolution de ces prochains jours. Mercredi 31 janvier, les agriculteurs semblaient concentrer les blocages à Paris et aux alentours et s’éloigner de la frontière franco-espagnole. Du côté de l’Espagne, plusieurs syndicats avaient déjà annoncé l’organisation d’une grande manifestation le 21 février prochain à Madrid, devant le ministère de l’Agriculture. En début de semaine, les principales organisations syndicales du secteur agricole ont indiqué vouloir organiser des mobilisations dans les prochains jours.

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