Édito de Nico Salvado, fondateur d’Equinox.
SOS Rural, un des principaux syndicats agricoles en Espagne, peste contre le gouvernement socialiste qui pratique « des politiques mettant à mal les coopératives et transforment », selon le collectif, « l’alimentation en produit de luxe ».
Les crises alimentaires, l’Espagne les connaît bien. Pendant les années de plomb du franquisme, le café était introuvable, le beurre remplacé par de la margarine. Ce qui explique encore aujourd’hui que les rayons de supermarchés sont remplis de ce produit. Un ministre de Franco avait émis l’hypothèse de développer le concept de sandwichs à base de dauphins pour nourrir une population affamée.
Nous n’en sommes évidemment pas à ce stade, mais une analyse détaillée des données collectées par le ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation démontre que la consommation de produits frais dans les foyers espagnols s’est effondrée au cours des quatre dernières années. Ce qui coïncide avec les épisodes de sécheresse qui a réduit les récoltes et avec l’inflation galopante qui poussent les foyers à économiser sur des produits préparés et surgelés moins chers.
Le régime méditerranéen en prend un coup avec une baisse allant jusqu’à 13 kilos de la consommation annuelle de fruits par habitant, qui est passée de 91,27 kilos à 78,24 kilos. La baisse est également notable pour deux autres aliments phares de la diète méditerranéenne : la viande et le poisson. La première est passée de 45,54 kilos à 40,56 kilos, ce qui représente une réduction de près de cinq kilos par an et par personne. La consommation de poisson a diminué d’un peu plus de quatre kilos pour s’établir à 18,48 kilos par habitant et par an.
L’effondrement de la consommation de poisson en Espagne est telle que des géants de la distribution comme Mercadona, leader absolu en termes de parts de marché dans le pays, effectuent des tests dans certains de leurs magasins pour concevoir un plan de réduction du rayon de poisson frais afin de se concentrer davantage sur le poisson précuisiné. Moins cher et de moins bonne qualité.
La bonne nouvelle, selon les enquêtes menées auprès des consommateurs, est que le goût des habitants pour le régime méditerranéen reste fort : « quand ils pourront dépenser un peu plus, ils reviendront aux nouvelles catégories ».