Aujourd’hui 11 septembre, les Catalans fêteront la Diada de Catalunya. Rien à voir avec les tours jumelles, il s’agit de la fête nationale. Les senyeras (drapeaux catalans) flotteront dans les cieux, les barretinas (bonnets phrygiens) coifferont les têtes des manifestants et vous entendrez résonner Els Segadors, l’hymne nationale dans les rues des villes catalanes.
Une fête nationale pour une région ? Ils sont fous ces Catalans !
Avant de nous intéresser à l’histoire de cette fête, voici une petite devinette qui fera le plus bel effet lors de dîners franco-catalans : Quel est le point commun entre Emmanuel Macron, la Catalogne, et le Real Madrid ?
Ils fêtent leurs défaites comme des victoires.
Ainsi, le 11 septembre 1714 n’eut rien de très glorieux puisque cette date marque la prise de Barcelone par les Bourbon.
Mariages consanguins, traîtrises, complots pour accéder au pouvoir… À l’exception des dragons et des sourires hollywoodiens, la Guerre de Succession (1701 – 1714) ressemble à s’y méprendre à un épisode de Game of thrones.
À la mort de Charles II, surnommé l’Ensorcelé à cause de son physique ingrat et de son incapacité à pourvoir un héritier, les Habsbourg d’Autriche et la famille des Bourbon de France se disputent le trône d’Espagne. Les conflits entre les partisans de l’archiduc Charles d’Autriche (Habsbourg) et de Philippe d’Anjou (Bourbon) secouent alors la péninsule pendant 13 ans.
Lorsque les Bourbon finissent par l’emporter, la Principauté de Catalogne, mauvaise perdante, affirme son soutien indéfectible à Charles d’Autriche, malgré l’imminence et l’évidence de la défaite. Pour corriger cette insolence, après avoir assiégé la ville, les troupes des Bourbon entrent dans la ville le 11 septembre 1714, et forcent les Catalans à s’agenouiller devant le nouveau roi. C’est en l’honneur de ceux qui se sont battus alors qu’ils se savaient perdus que l’on célèbre aujourd’hui la Diada de Catalunya.
Barcelone la résistante
Envahie par les Wisigoths, les musulmans, les Carolingiens, les Bourbon, les franquistes… Barcelone capitula de nombreuses fois face à l’ennemi. Pourtant, tout au long de son histoire la ville n’a cessé d’être le théâtre de grands mouvements sociaux. Ainsi, le 10 juillet 1910, elle accueille l’une des premières manifestations en faveur des droits des femmes dans le monde, organisée par Ángeles López de Ayala. En 1936, alors que la guerre civile embrase l’Espagne, Barcelone soutient les forces républicaines et organise les olympiades populaires en réponse aux Jeux olympiques de Berlin.
Dans Hommage à la Catalogne, l’écrivain George Orwell dresse cette description de la ville : « C’était bien la première fois dans ma vie que je me trouvais dans une ville où la classe ouvrière avait pris le dessus (…) Presque tout le monde portait des vêtements de prolétaires, ou une salopette bleue, ou quelque variante de l’uniforme de la milice. Tout cela était étrange et émouvant. Une bonne part m’en demeurait incompréhensible et même, en un sens, ne me plaisait pas ; mais il y avait là un état de choses qui m’apparut sur-le-champ comme valant la peine qu’on se battît pour lui. » Bombardée par les Italiens en mars 1938 avant d’être prise par les forces franquistes en février 1939, la Catalogne fut l’un des derniers bastions de la résistance au fascisme.
11 septembre 2024 : une fête sous le signe de la pluralité
La célébration de la Diada est rétablie cinq ans après la mort du dictateur, en 1980. Et, au-delà des évènements du 11 septembre 1714, elle commémore la mémoire de ceux et celles qui ont résisté dans l’adversité en portant dans leur cœur, l’espoir d’un avenir meilleur.
Musées gratuits, danses traditionnelles, musique folklorique, batucadas, castellers… Si le programme est axé autour de la culture catalane, la Generalitat a mis l’accent sur la pluralité avec une vidéo célébrant un coeur tissé par des millions d’histoires personnelles, fier d’être pluriel et ouvert à tous les catalans et catalanes.
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