Quand le tourisme fait de Barcelone un enfer

Trop de touristes, pas assez d’encadrement, l’été 2018 a mis sur les dents de nombreux Barcelonais. Etat des lieux d’une saison qui a encore battu tous les records d’affluence. 

Les commerçants du centre-ville de Barcelone à bout de nerfs

Les vendeurs ambulants de plus en plus nombreux à Barcelone exaspèrent les petits commerçants qui y voient une concurrence déloyale. D’autant plus que les fonctionnaires de la mairie d’Ada Colau sont impitoyables avec les ordonnances concernant l’occupation de l’espace public devant les commerces. L’histoire de la fleuriste historique de la Rambla de Catalunya qui se voit obligée de couper son bougainvillier donnant sur le trottoir, sous la menace d’une amende mettant en risque le commerce, en est la parfaite illustration.

Intransigeance avec les commerçants, tolérance avec les vendeurs ambulants, laxisme avec les incivilités : les commerçants n’en peuvent plus. Fin août, le fondateur de la marque catalane spécialiste du vélo urbain « Bicis Brompton » a annoncé la fermeture de sa boutique dans le Gotic. Daniel Milian affirme ne plus supporter les touristes ivres morts qui sont agressifs verbalement, parfois physiquement, comme cette fois du mois de juillet où un touriste sous l’influence de l’alcool a brisé sa vitrine en lançant une chaîne antivol de moto.

Le camping sauvage de touristes dans les parcs de la ville

Ils viennent passer leurs vacances à Barcelone sans un sou en poche. Pas d’argent pour se payer un hôtel ou une chambre, ces touristes ultra-low cost ont trouvé la solution : dormir à la belle étoile dans les parcs de Barcelone.  Orgies d’alcool dans la rue, les bars sont trop chers pour ces visiteurs, les samedis soirs sont devenus un enfer pour les habitants de la Barceloneta. Le parc de la Catalana, de par sa situation proche de la plage, est privilégié par ces squatteurs d’un nouveau genre.

Decenas de turistas acampan en un parque de la Barceloneta

Le vice-président de l’association du quartier, Manel Martínez, affirme que ces touristes n’hésitent pas à se droguer dans le parc jour et nuit, attirant trafics et vols. Selon la Guardia Urbana et les Mossos d’Esquadra qui ont lancé des opérations pour appréhender ces vacanciers, il s’agit de bandes mobiles qui font le tour de l’Europe cherchant les destinations touristiques.

Les appartement touristiques illégaux à Barcelone

En plus des campeurs sauvages, la Barceloneta est envahie d’appartements touristiques illégaux. La capitale catalane compte 9600 appartement légaux, auxquels s’ajoutent entre 6000 et 8000 logements touristiques non autorisé, dont beaucoup sont dans le quartier de la Barceloneta.

Les touristes vivent sur un autre rythme que leur voisins, surtout dans ce quartier populaire où beaucoup de familles doivent travailler pendant la saison estivale. Arrivées et départs de touristes avec leur valise à toute heure du jour et de la nuit, fêtes non-stop avec alcool et drogue dans ces petits appartements ont rythmé l’été des habitants, qui n’auront pas trouvé le repos pendant cette période traditionnelle de détente.

Des vigiles privés contre les vendeurs de canettes de bières ambulants

Si le « cerveza beer amigo » amuse beaucoup les fêtards, il ne fait pas les rires les commerçants. Le manque à gagner pour les établissements nocturnes est tel que les bars du Passeig del Born a engagé des vigiles pour faire fuir ces vendeurs illégaux. Les « lateros » n’ont pas de limite, ils démarchent les clients avant qu’ils entrent dans les bars pour leur proposer des bières à consommer dans la rue. Non seulement l’établissement de nuit perd sa clientèle, mais en plus se retrouve avec des groupes éméchés dansant dans la rue, donnant la plus mauvaise image possible du quartier.

Du coup les établissements du Paseo ont fait appel à une société de vigiles privés pour faire partir les « lateros »: Blau Control . Il ne s’agit pas d’une milice policière affirment les responsables de l’agence ainsi que les commerçants. Les vigiles rappellent juste aux vendeurs ambulants l’illégalité de leur tentative de vente. Si les vigiles aperçoivent un voleur, ils appellent la police pour une intervention. Une opération qui a reçu la bénédiction de la mairie de Barcelone et qui porte ses fruits. A tel point que trois clubs de plages barcelonais à Sant Sebastià, Nova Mar Bellaet Bogatell, eux aussi victimes de la concurrence déloyale des vendeurs ambulants, viennent de faire appel à la même société.

Le narcotourisme du Raval

Les habitants du Raval sont eux aussi sous tension. Depuis deux ans, l’ambiance du quartier populaire s’est dégradée. A Barcelone, globalement il n’existe pas de zone de non-droit similaire à la France. La police entre partout. Cependant depuis quelques temps, le Raval a vu déferler une nouvelle forme de tourisme : le narcotourisme.

Non seulement les dealers vendent de l’héroïne dans des appartements spécialement loués pour le trafic, mais ils proposent des chambres pour que les consommateurs puissent se piquer directement sur place. Dans un total surréalisme, s’il n’y a plus de place à l’intérieur des appartements, les dealers installent à même la rue des matelas pour que les toxicomanes s’endorment après leur shoot.

La situation a empiré en juillet et août avec l’arrivée de touristes éméchés et particulièrement demandeurs “d’appartements où l’héroïne est disponible”. Résultat : certains s’endorment un peu partout dans les rues du Raval, transformant ce quartier en squat géant.

Les vols à la tire

Une bande de jeunes s’approche de sa cible. L’un des membres propose innocemment de serrer la main de sa victime. Un geste apparemment amical qui n’a pas d’autre but que de se rapprocher de sa proie afin de dérober montre, bracelet et bijou. Une opération qui se passe avec plus ou moins de violence. Le but des voleurs, plutôt que de frapper la victime, est de détourner son attention. Barcelonais, touristes, les victimes sont choisies au hasard. Seul critère : posséder un bijou plus ou moins onéreux.

Selon des sources proches des Mossos d’Esquadra et de la Guardia Urbana, ces vols sont actuellement effectués par des bandes de jeunes venus d’Afrique du Nord qui se déplacent dans toute l’Europe afin de fuir la justice. Ils sont cet été en nombre à Barcelone, attirés par la foule de touristes, mais n’hésitent pas à s’attaquer aux résidents locaux. L’article 234 du code pénal qui ne prévoit pas de poursuites si la valeur du bien dérobé est inférieure à 400 euros dissuadent beaucoup de victimes de déposer une plainte.

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