Serge Bourgeois : « La Bienfaisance aide les Français de Catalogne depuis 175 ans »

medecin français à Barcelone

Serge Bourgeois, 71 ans, est le président de la Société générale Française de Bienfaisance de Barcelone. Fondée en 1845, l’association offre une aide à la fois financière et psychologique aux Français de Catalogne dans le besoin. Depuis 10 ans, Serge Bourgeois s’implique auprès de la communauté française de Barcelone. Rencontre. 

Photo : C.Laurent/Equinox à Wojo

Pouvez-vous revenir en quelques mots sur l’histoire de la Bienfaisance de Barcelone ? 

L’association a été créée en 1845 dans une période particulière. Trois ans auparavant, la ville est bombardée et en 1843, elle est assiégée. À l’époque, le Consul de France était Ferdinand de Lesseps. Il est intervenu pour faire arrêter les bombardements et négocier. Il a fait évacuer une grande partie de la population française sur des bateaux français amarrés dans le port de Barcelone. Il avait également largement aidé la population barcelonaise. La cité comtale lui a rendu hommage en nommant une place à son nom. Après ces événements, beaucoup de Français ont commencé à vivre à Barcelone. Parmi eux, une quarantaine de nantis, industriels et commerçants, se sont réunis avec le Consul et ont fondé une association pour venir en aide aux Français de Barcelone les plus démunis.

Au début, cette quarantaine de familles françaises cotisées chacune pour faire fonctionner l’association. Ensuite, la Bienfaisance a perçu d’autres dotations qui constituent un capital immobilier très développé et permettent d’apporter des aides économiques aux Français de Barcelone. Le 31 août 2020, l’association célébrait déjà ses 175 ans.

Combien de personnes travaillent pour cette association ?

Au total, une personne travaille à plein temps et deux autres à temps partiel pour s’occuper de l’administration et du coaching vis-à-vis des Français. Ensuite, nous travaillons avec des volontaires qui visitent les bénéficiaires de nos aides pour développer les relations sociales créées par la Bienfaisance.

Quand avez-vous été élu président de la Société générale Française de Bienfaisance de Barcelone ?

Cela fait 6 ans que je préside l’association et je suis dans le Conseil d’administration depuis une dizaine d’années.

Comment aidez-vous les Français de Barcelone ? Sur quels critères accordez-vous les aides ?

Pour les critères, la personne doit être de nationalité française, résidente en Catalogne et elle doit justifier qu’elle ne perçoit aucun revenu, et qu’elle ne dispose pas de famille proche pour l’aider. Le montant maximal de nos aides est de 450 euros. On essaie d’équilibrer le budget de manière à ce que la personne puisse se loger et se vêtir. Nous collaborons avec d’autres associations comme Barcelone Accueil avec laquelle nous organisons des collectes d’aliments, qui sont ensuite distribuées aux démunis par le biais de volontaires. À ce jour, une trentaine de personnes bénéficie de nos aides.

Avec la pandémie, avez-vous remarqué une augmentation des demandes d’aide ?

Oui, nous avons observé une augmentation de 30 % des demandes en 2020. Beaucoup de personnes se sont retrouvées au chômage, ou ont perdu leur emploi à cause de la pandémie, d’où cette forte demande.

Pouvez-vous établir un état des lieux des derniers mandats ?

On aimerait modifier notre procédure d’accompagnement. Par le passé, on suivait les gens pour voir dans quelles conditions ils vivaient et ensuite leur remettre des aides économiques. Ces dernières années, on s’est retrouvé avec de plus en plus de gens victimes d’accidents de la vie comme un divorce, une perte d’emploi, etc. Si on ne donne pas les moyens à une personne de se remettre dans la vie active et d’être capable de retrouver un travail alors sa situation de détresse peut perdurer. Donner de l’argent, c’est simple, en revanche, coacher psychologiquement est bien plus compliqué. C’est là que nous mettons plus l’accent depuis deux ans. On veut proposer un suivi personnalisé.

Collaborez-vous avec des spécialistes ?

Nous avons un réseau de professionnels composé de psychologues, médecins, orthophonistes, etc… Qui proposent à nos bénéficiaires des prestations gratuites ou à tarifs réduits.

Serge Bourgeois, président de la Bienfaisance de Barcelone © Equinox/Clémentine Laurent

Comment se traduit votre lien avec le consulat français de Barcelone ?

Nous avons de très bonnes relations avec les services sociaux français. Le réflexe d’un Français à Barcelone qui rencontre un problème est de se rendre au consulat pour voir s’ils peuvent lui accorder une aide. Le consulat est en mesure de soutenir des personnes handicapées ou des enfants. Ils ont des budgets pour ça. Des aides Covid ont également été mises en place pour aider les entrepreneurs touchés de plein fouet par les problèmes liés à la pandémie. Quand le consulat ne peut pas prendre en charge une personne, il l’oriente vers nous et on prend le relais. Parfois, la mise en place des aides du consulat peut être un peu lente, on intervient alors pendant cette période de battement.

Quels sont vos projets pour l’association ?

Nous aimerions avoir plus de volontaires et professionnels pour réaliser nos actions. Par exemple, durant l’année 2020, les personnes qui se sentaient seules étaient en contact avec nous seulement par téléphone. Il était impossible d’avoir des contacts en présentiel avec elles. Cette période a été très compliquée pour nos bénéficiaires. Alors, on recherche plus de volontaires pour fructifier ce lien et renforcer le suivi.

Êtes-vous en contact avec les autres associations françaises de Barcelone ?

Nous avons une très bonne relation avec Barcelone Accueil. Auparavant, j’ai eu une vie associative riche. J’ai été trésorier de la Chambre de commerce française de Barcelone pendant presque 20 ans. Donc, nous avons une bonne relation avec la chambre de commerce.

Il y a quelques années, nous avons travaillé sur le livre des Français de Barcelone et beaucoup d’associations françaises y ont participé : Consulat, Institut français, Barcelone Accueil, les Amis d’Alsace en Catalogne, etc. Cette collaboration a porté ses fruits, car on a gardé une bonne relation entre nos collectifs. En septembre, Barcelone Accueil organise la journée des associations durant laquelle tous les groupes associatifs français seront présents.

Souhaitez-vous briguer un nouveau mandat pour la présidence de la Bienfaisance ? 

Pas forcément. Cela fait 6 ans que je suis président, je ne suis pas accroché au fauteuil. On manque cependant de candidats. La vie associative peut être difficile.

Quel message aimeriez-vous faire passer aux Français de Barcelone ?

L’association n’est pas connue. C’est un handicap, car nous avons peu d’adhérents. Par exemple, dans les années 60, l’association comptait 500 membres. À l’époque, les relations étaient beaucoup plus étroites entre le consulat et la Bienfaisance. Les Français qui s’installaient à Barcelone et se rendaient au consulat étaient directement invités à devenir membre de la Bienfaisance. Maintenant, le nombre d’associations françaises à Barcelone est beaucoup plus important, donc nous avons moins de visibilité. On essaye de communiquer au mieux en organisant des manifestations, des dîners de gala, des concerts ; etc.

Concernant votre rapport à la capitale catalane, depuis combien de temps vivez-vous ici ?

Je suis originaire de Paris. J’ai ensuite rejoint Rouen pour mes études de commerce. J’ai commencé ma carrière professionnelle à Barcelone en 1974. Cela fait 45 ans que je vis ici.

Quel est votre lieu favori de Barcelone ?

J’adore la vieille ville, notamment la zone entre Urquinaona et l’Arc de Triomf. Elle est très vivante et pleine de charme.

Souhaitez-vous y rester encore longtemps ?

Oui, je suis mariée avec une Catalane de Barcelone, j’ai 4 enfants et 8 petits-enfants, et la majorité de ma famille se trouve en Catalogne. J’ai passé plus de temps à Barcelone qu’à Paris. Ma vie est ici.

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