A Barcelone, les chiens sur le point de remplacer les enfants

Barcelone chiens

Plus de chiens que d’enfants à Barcelone ? D’après les statistiques, ils se placent quasiment sur la même marche d’un point de vue numérique. Un phénomène qui traduit à la fois l’amour des Barcelonais pour leurs toutous, mais aussi le remède à un quotidien incertain. Explications.

« Dans certaines zones de Barcelone, il y a plus de chiens que d’humains », annonce Michael Fernandes. Le décor est planté. Celui qui s’est installé dans la capitale catalane en août dernier, en tant qu’éducateur canin chez Perro Sano, le voit au quotidien. « Et le samedi après-midi ou le dimanche, il y a du passage tout le temps. Tu peux croiser un chien toutes les secondes au Parc du Forum ou à la plage ».

A tel point qu’à Barcelone, les boules de poils arrivent même aux chevilles des enfants. D’après les derniers chiffres du Collège des vétérinaires de Catalogne, pas moins de 170 505 chiens vivaient à Barcelone en 2021, et 77 163 nouveaux ont été enregistrés en 2022. Seulement 1 000 de moins que les enfants de moins de 12 ans. Les données montraient à l’époque une grande présence des Terriers de Yorkshire, de Chihuahua, de bichons maltais, mais surtout de « mélanges ». Michael Fernandes confirme : « les Espagnols sont nombreux à adopter des chiens dans les refuges (protectoras) ». Ils sont au coude-à-coude aujourd’hui avec les lévriers espagnols, aussi appelés Galgo.

Animal à Barcelone

Photo : Mariona Gil

Alors que dans le même temps, la natalité baisse dans la péninsule ibérique. En 2021, le taux de fécondité atteignait l’un des plus bas d’Europe. Projets de carrière, instabilité financière, inflation, montée en flèche des loyers ou encore avenir incertain. Nombreuses sont les raisons expliquant le refus de fonder une famille, selon les sociologues interviewés dans un récent article de La Vanguardia. « Le monde est de plus en plus incertain, donc les envies de mettre au monde des enfants baissent par inquiétude pour leur avenir », analyse le psychothérapeute français installé en Catalogne, Nicolas Laheurte.

« Beaucoup considèrent leur chien comme des enfants »

Nos amis à quatre pattes compensent-ils l’absence d’enfants ? Difficile à dire. Et même impossible, selon l’expert en psychologie. « C’est une compensation à la société de plus en plus insécurisante. L’humain a besoin de sécurité et l’animal est un palliatif. »  Nicolas Laheurte parle même d’une véritable contribution grâce à leur « amour inconditionnel ». « L’animal de compagnie aime totalement, sans freins. Tandis que l’humain a perdu cet instinct archaïque au cours de son développement. » Le psychothérapeute voit avant tout la quête d’émotions spontanées et le « retour d’amour immédiat » que ne peut pas offrir un enfant, et sans la même dose de responsabilité. En clair, le parfait remède à une insécurité intérieure.

Qui peut, parfois, s’accompagner de travers. « Ça arrive assez souvent que les maîtres considèrent leur chien comme des enfants », assure l’éducateur suisse de Barcelone. Parmi ses clients, bon nombre ne possèdent pas d’enfants, ou bien ces derniers ont déjà quitté le nid. « Et beaucoup de personnes âgées cherchent à retransmettre à leur chien ce qu’elles apprenaient à leurs enfants. Elles leur transfèrent ce qu’elles ne peuvent plus donner à leur famille », ajoute Michael Fernandes. Sauf qu’humaniser un animal provoque des problèmes d’anxiété ou de comportement. Et ce, malgré tout l’amour voué à ces boules de poils. Lui, reste, quoi qu’il arrive, indéniable.

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